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J’ai cent griefs, tous minuscules. Au fond, je sais que tu agis avec moi selon la liberté que j’admire en toi, cause de toutes mes anxiétés, et au fond je ne voudrais pas qu’il en fût autrement.
Ce que j’ai le plus envie de te dire, mais je voudrais trouver une forme plus originale pour que tu l’entendes avec l’intensité aussi, c’est merci.
Je n’avais pas compris que je te soutenais pendant une période de faiblesse. Mais que pouvais-je espérer de mieux au monde que de sentir le corps le plus savoureux et l’esprit le plus délicieux appuyés sur moi, en toute confiance ?
J’ai compris que maintenant, fortifiée, tu as besoin de libérer pleinement la place à côté de toi, que j’occupai à moitié. Je suis donc si peu. Ta loi est dure, ma Sophie, mais pas injuste. J’ai seulement peur que ce qui est si important pour moi soit perdu dans la nuit.
Tout ce que tu fais est à la fois prosaïque et magique. Entre nous tu as toujours voulu me convaincre du prosaïque, et moi du magique. Pour toi, tout ce qu’il y a entre nous est simple, commun, sobre, sans écho ; pour moi, tout est grand, riche, mystérieux, sublime. Notre différence ne s’exprime nulle part mieux. Quand, hier, au petit matin, j’ai enfin pu contempler ton visage à la lumière de ton sommeil, pendant une heure trop courte, la magie recouvrait entièrement le prosaïque, de ses idées scintillantes, pleines de douces émulsions. Au fond de mon abattement, je souriais de joie.
Je ne pourrai jamais te voir sans être ému jusqu’au ravin. En cela tu es la seule personne au monde.
J’ai un peu froid maintenant. J’essayerai de t’appeler dans la semaine, sauf si tu me l’interdis.
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