Posted by on November 12, 2000 at 01:45:00 PM EST:
L'image de Papy Voyer que dessinent actuellement les petits activistes de la voyérisation (l'impuissance théoricienne qui soutient la falsification) est une sorte de croisement entre un buste d'Hô Chi Minh, un poster de Bob Dylan et un autocollant de Mickey Mouse.
Papy Voyer, selon ce petit peuple de zélateurs, ne commet jamais de fautes, n'a jamais tort, ou alors c'est qu'il est emporté par sa fougue légendaire, c'est-à-dire que ses fautes sont à son honneur. On dessine ici un personnage d'une positivité absolue. La caricature de cette iconographie est la triplette magique largement utilisée par le stalinisme : les portraits de Marx, Lénine, Staline sont dans une logique ascendante. Le dernier de la série est toujours le parfait, le sceau des prophètes, celui qui a corrigé les erreurs des autres, qui sont cependant excusés par l'arriération de leur époque. Quand le docteur Mondepoing personnalise ainsi les théories du passé (Hegel, Marx, Voyer), c'est pour les mêmes raisons que Staline : 1. On ne doit discuter que de ceux-là, tout le reste c'est de l'inutile ou de l'hérésie ; 2. Seul celui qui trouvera la faille de ces théoriciens-là pourra accrocher son portrait en quatrième position ; après la mort du troisième, va sans dire.
Quand Papy Voyer falsifie grossièrement, on est donc pour les voyérisateurs dans une impossibilité ontologique. Comme chaque mot, chaque excrément du vieillard débile est sacralisé et avalé tout cru, le fait que ce lâche résigné ait pu falsifier est exclu par définition. La critique doit être admise, publiquement et solennellement, par Voyer lui-même pour avoir rang de critique, parce que Voyer lui-même quand il était encore jeune avait appelé à la critique. Quelle vieille rengaine de conservateur !
Lorsque le vieux Voyer ne peut pas répondre, sauf lâchez-moi ou vous êtes un oppresseur, c'est ceux qui le tiennent par la cravate qui sont maintenant des imbéciles et des falsificateurs. La critique étant une affaire interne au parti, il s'agit de montrer que toute forme de critique extérieure est soi une connerie, soit une infamie. Nous engageons vivement tous ceux qui veulent vérifier pourquoi Voyer s'est senti obligé de falsifier Adreba Solneman à lire leur correspondance, et en particulier la partie tronquée par l'enculé Voyer et son ouistiti von Nichts (dans leur édition crapuleuse, on remarquera que le nom Adreba Solneman est même absent de l'index, où, par contre, on trouvera facilement celui de Jean-Pierre Voyer quand il y est nommé par Adreba Solneman).
La théorie de Voyer est magnifiée, mais jamais discutée. Les téléologues, qui se sont amusés à démonter publiquement la plupart des nouveaux textes que cette vieille truqueuse a bredouillé depuis deux ans, n'ont jamais été contredits sur toutes ces réfutations faciles de l'impotent théoricien postpédé. Silence de mort dans les rangs voyérisateurs : contrairement à l'économie, qui n'existe pas, mais dont on bavasse tout le temps pour s'émerveiller du génie de son inexistence, les claques des téléologues sont occultées, taboues, effacées comme les opposants dans les services photo de Staline. Voyer prépare en ce moment un site Internet qui s'appelle « tout sur Jean-Pierre Voyer » et où ne figure, pour l'instant, que sa lettre, consternante, à Houellebecq. Le véritable titre de ce site est donc déjà : tout sur Jean-Pierre Voyer sauf la vérité. Dans la voyérisation, Voyer n'est pas un sujet de débat, mais quelque chose qu'on consomme positivement, pas quelque chose qu'on discute, mais quelque chose qu'on approuve. Rappelons ce qui ne peut pas figurer, pour ce que c'est, c'est-à-dire le préalable d'une critique de fond en comble en passant, dans « tout sur Jean-Pierre Voyer » : « Si tout a une fin, comme nous le soutenons, et ce que personne n'est encore parvenu à invalider, alors la communication n'est pas infinie, la médiation n'est pas infinie, la division du travail n'est pas infinie, l'aliénation n'est pas infinie, la connaissance n'est pas infinie, et toute la théorie de Voyer s'écroule comme un château de cartes. » Soit il faut prouver que tout n'a pas de fin ce qui implique au minimum de répondre à 'Réfutation de quelques infinis' , soit il faut expliquer en quoi communication infinie, médiation infinie, etc. sont compatibles avec tout a une fin, soit il faut expliquer comment la théorie de Voyer peut se maintenir sans ces infinis.
La phase actuelle de la voyérisation, en partie grâce à la critique que les téléologues mènent, et dont Voyer n'est qu'un petit maillon spectaculaire, consiste à faire de l'enculé Voyer un intouchable, au-dessus de la critique, au-dessus du reproche même. Tout défaut de la star est tourné en apologie. En effet, la théorie de Voyer, inoffensive dans le monde, inopérante dans la pratique, a toutes les apparences de la modernité et de la radicalité. Elle est donc un excellent outil pour briller en société, pour faire le rebelle lettré dans une soirée, pour scandaliser les concurrents debordiens. La théorie de Voyer a un vrai potentiel de mondanité dans la conversation. C'est exactement ce que montrent, en négatif, les voyérisateurs d'aujourd'hui, comme le docteur Weltfaust, dont le nom est déjà une imitation laborieuse du style germano-provoc de l'obercacastrumpfrührer Voyer, ou comme cet YBM servile et bête, dont la signature signifie : Y a Bon la Misère.