Posted by on July 24, 2000 at 05:08:49 PM EDT:
Au commencement était le verbe. J'entends le verbe en acte. J'entends faire ce que je dis. J'entends dire ce que je pense. J'entends manier les mots comme des princes. J'entends exprimer mes désirs pour les réaliser. J'entends le sens de la rupture. Ce principe premier de recherche d'une cohérence, ne pas faire mentir ma vie, ne pas faire mentir les mots, est bien davantage au cœur de ma contestation globale de ce monde que « la critique en actes du travail salarié, selon un principe premier hors de discussion : "Ne travaillez jamais" ». D'entrée j'ai discuté, critiqué l'injonction « Ne travaillez jamais » venant de ceux-là mêmes qui travaillent. D'entrée j'ai discuté, critiqué le mensonge de cet impératif en dehors de la situation insurrectionnelle où il a été mis en jeu, impératif qui ferait mentir l'individu isolé insatisfait que je suis. Pratiquer l'argent, n'est-ce pas déjà du travail ? Finir l'argent est-il un but en soi ? Quels choix de vie en découlent, si tel est le but ?
Discuter le « Ne travaillez jamais » n'empêchait pas et n'empêche toujours pas de discuter nos modes de survie. Faut-il « détourner » l'argent des parents, des amis, des mécènes ? Faut-il voler, tricher, arnaquer ? Faut-il enfin se vendre et de quelle manière ? Jusqu'où ? Jusqu'où engager ma pensée, ou mon cul, ou mes bras ? J'engage aussi ma négativité et ma solidarité dans ces choix-là. Je pense ces choix-là. Il n'est pas pour moi indifférent d'être médecin ou chauffeur de taxi, employée de base ou chef d'équipe, d'accepter ou de refuser un héritage, de voler ou d'escroquer. Et si ces choix-là dessinent en creux une foule de compromis qui, pour moi, sont inacceptables, j'admets tout à fait que les compromis que je suis amenée à faire, dans ma survie, soient inacceptables pour d'autres. Mais répétons-nous. Il n'y a pas de gloriole à tirer de tel ou tel mode de survie. Et quand bien même Obertopp n'aurait pas de carte bleue, de revenu fixe, de loyer assuré et d'argent en poche pour un café-calva, je lui dénie absolument la prétention d'avoir un mode de survie radical qui l'exonérerait de ces compromis qui permettent de rester en vie pendant vingt-sept ans, et qui l'autoriserait à mentir comme elle l'a fait, en commençant par la diffamation la plus grossière : menteurs, mystificateurs, militants.
J'ai, par contre, un très grand respect pour ceux qui savent « tenir » leur parole. J'entends ceux qui ne disent pas une chose pour son contraire et ceux qui savent se taire quand il le faut (que ce soit au travail ou dans un commissariat). Heureusement que nous comptons dans notre parti quelques « agents doubles » qui savent ce qu'ils font quand ils le font, ne se la racontent pas, ne se la pètent pas quand ils travaillent, et ne la racontent pas quand ils ont maille à partir avec la police. La honte de la satisfaction affichée – il y en a même qui font des enfants – n'a rien à envier à la honte de l'insatisfaction secrète. Heureusement que nous avons dans notre parti des sans domicile fixe, des sans travail assuré, des sans permis de conduire ni carte bleue (oui, tout ça à la fois), qui ne se la racontent pas comme notre modedevitiste Obertopp, mais qui connaissent la gravité des mots, comme ceux de mensonge, de vérité formelle et de vérité pratique. Qui savent justement faire la différence entre extrapoler et mentir ; entre se bastonner et fuir ; entre la pensée négative et la pensée crapuleuse.
Je n'ai certainement pas été à la même école qu'une Obertopp. Et si je suis redevable de quelque chose à mes parents, c'est sans doute de m'avoir communiqué, davantage même que le goût de la vérité, cette horreur du mensonge qui permet de mettre sa pensée en actes, jusque dans la rupture. Je suis de ceux qui rendent l'argent prêté, qui tiennent leur promesse et engagent leur solidarité dans des projets ponctuels. Pour ces projets-là j'engage ma fiabilité, comme pour tout ce qui me tient à cœur dans ma vie : ma parole n'est pas un vain mot. Si la survie ne laisse pas indemne, la vie pas davantage. Obertopp peut parler de prise de risques quand elle se débine comme elle le fait après avoir mis dans nos bouches des propos contraires à ce que nous pensons et contraires et à ce que nous disons. Si nous n'avions pas jusque-là traité Obertopp de menteuse, c'est que nous avions préféré lui rappeler ce que ses extrapolations outrancières lui avaient fait oublier (cf. 'Misère du modedevitisme I'). Sa fuite prouve aujourd'hui qu'elle n'avait pas lu une ligne sur deux, mais qu'elle mentait sans vergogne, et qu'elle en est réduite comme le bouffon Bueno à hurler dans sa fuite les insultes qu'elle craint : menteur, mythomane, etc. Le lien qu'Obertopp fait entre vie et mode de survie se trouve effectivement confirmé pour elle dans son expression publique : elle n'est pas fiable. Elle peut essayer d'apporter toutes les précisions qu'elle veut sur tel ou tel point, elle n'en restera pas moins une menteuse, qui nous a imputé cette contre-vérité : « Si nous disons quelque chose qui n'est pas d'accord avec la vérité formelle, nous ne mentons pas, nous affirmons la vérité pratique. »
Obertopp ne sait pas ce que c'est que « tenir » sa parole. Parce que sa connerie l'empêche d'envisager une pensée négative autre que celle qu'elle connaît, elle est venue nous diffamer. Elle n'a pas réussi à prouver ses diffamations, alors elle a forcé son extrapolation jusqu'à mentir, formellement. Et elle fuit maintenant. Elle appelle ça être tombée dans un piège ! Elle prétend que nous n'attendions que ça, comme si elle avait quelque importance pour nous en dehors de l'énormité de sa crapuleuse accusation publique de mensonge.
Pour la théorie, Obertopp manque de cette rigueur qui lui permettrait de comprendre ce qu'elle lit, et de tenir sa parole quand elle l'ouvre. Elle se comporte en spectatrice, en touriste de la théorie comme d'autres se comportent en spectateurs, en touristes de l'émeute. Elle va à la théorie du bout des doigts, elle rejette comme d'autres consomment, à grands coups d'a priori (qu'elle ne peut pas fonder, bien sûr). Elle n'est pas à fond dans la dispute. Quand la confrontation devient un peu chaude, qu'il faut remettre en question ses a priori, ou revenir sur ce qu'elle a dit et s'excuser, elle préfère s'esquiver, en s'appuyant au passage sur le menteur Bueno : elle présente son derrière, la queue entre les jambes, et meugle à court d'arguments « on ne discute pas avec ces gens ». Minable.
La théorie est d'abord une pratique (et non seulement la théorie de sa propre pratique). La théorie est une des expressions de la vie, une des pointes de l'iceberg dont Obertopp n'a pas idée, parce que là il n'y a pas de recette, de recopiage possibles, chacun avance en terrain non encore défriché. La pensée négative est le résultat d'une bagarre, d'une embrassade, d'une dispute sur les mots qui touche au cœur. La théorie n'est théorisme que pour des Obertopp qui ne savent pas se bagarrer avec les mots, avec le faire, avec l'engagement du verbe. J'ai pu vérifié que l'exigence d'un minimum de cohérence entre ce qu'on dit et ce qu'on fait s'effondre souvent comme un château de cartes quand il est contredit par le conformisme de son milieu. Adoubée par son petit milieu, Obertopp s'autorise toutes les approximations et tricheries montrées dans 'Obertopp et mensonge' et 'Misère du modedevitisme I'. Mais moi qui ne suis pas là pour la galerie ou pour la petite famille, mais seulement pour défendre mes projets, ma parole, et pour dire mon insatisfaction, je crache à la gueule de ce misérabilisme satisfait dès lors qu'il soutient le mensonge.