A) Du 9 janvier 1978 au 16 février 1979


 

5) 4, 5 et 6 novembre 1978

Sur 50 nouveaux cadavres, le 24, a commencé la dernière semaine d'octobre. Chaque jour, la désobéissance accumule les progrès et ses zélateurs en multiplient les adeptes. Le mouvement se soude, une unité d'ambiance se fonde, plusieurs avalanches semblent confluer vers une nouvelle journée révolutionnaire, dont le Vendredi Noir n'aura été que le sinistre présage.

Alors que son 59e anniversaire est marqué par des manifestations et l'ostentatoire obscurité du Bâzâr (la ville devait être illuminée), alors que, chaque jour maintenant, ses sujets sont massacrés pour sa sauvegarde (des morts sont avoués le 27, le 29, le 30 et le 31), alors que son armée est obligée d'occuper les champs de pétrole d'Abâdân (le 31) pour qu'au moins leur possession échappe aux grévistes, alors que ses adversaires qu'il croit politique de libérer (les ayatollahs Tâleqâni et Montâzeri le 31) sont acclamés par 250 000 personnes au coeur de sa capitale, le Shâh d'Iran perd courage. Ce n'est pas un télégramme de félicitations de Brejnev (qui n'est pas de l'ironie) pour son anniversaire, ni la réception faite à son fils le jour de ses 18 ans par Carter, qui lui éclaircit l'esprit et l'engage aux décisions tant attendues de ses partisans. Car s'il y a des barricades dans Abâdân, ce même 31, il y a la grève à Iran Air et les Iraniens manifestent jusque sous les fenêtres de la Maison-Blanche, gâchant la fête de l'héritier en alertant le protecteur du père.

Ces marques de bienveillance réitérées des gouvernements américains et russes ont, après coup, surpris. Le Shâh était un tortionnaire notoire, un dictateur que la morale politique situe sans contredit à l'extrême droite, insoutenable devant le public de ces deux Etats. Mais le Shâh avait fasciné par sa fortune. Auréolé par la presse la plus populiste, ce fat avait vu se répandre parmi les dirigeants plus puissants mais moins absolus que lui l'habitude de le courtiser. Comme dans l'époque pré-historique de l'Iran (avant 1978), il fut identifié seul à la valeur marchande de tout ce qui émanait de son pays, l'habitude, la facilité, l'aveuglement contribuèrent fort à ce que les gouvernements américains, russes, chinois, japonais et de la Communauté Européenne, continuèrent de le soutenir, tous, même au-delà du point critique. Mais pourquoi n'avoir pas remplacé ce petit dealer brutal et corrompu à partir du moment où il devint évident que ses subordonnés mettaient en péril la galette pour avoir sa tête ? Eh bien, aussi peu le Front National pour les Américains, que le parti Tude clandestin pour les Russes, ne représentaient suffisamment les remous qui alertaient maintenant l'attention du monde, pour s'emparer sans risque de l'Etat iranien. Et les religieux, qu'est-ce que c'était ? Tout sauf le futur Etat. Alors, il ne reste que le Shâh et vaincre rapidement cette grandissante rébellion sans têtes, avant que ce cauchemar insensé ne se rêve dans d'autres lits.

Devant le désarroi du Roi des rois, c'est à son parrain, le Président des Etats-Unis, que les lieutenants du Shâh demandent de prendre une décision qui se fait attendre depuis que le Vendredi Noir a creusé cette vague dont l'amplitude se manifeste maintenant dans le déferlement.

Sharifemâmi est trop dur, lui disent les représentants de la fraction technocrate-libérale du parti de la Raison. L'armée est aussi haïe que le Shâh, elle est trop exposée. Le Vendredi Noir, au lieu d'arrêter la passion des gueux, l'a décuplée, et la provocation quotidienne des armes continue de l'aggraver. Ce qu'ils veulent, nous ne le savons pas vraiment et nous doutons qu'eux-mêmes le savent. Mais, renvoyez Sharifemâmi, laissez-nous organiser une monarchie constitutionnelle avec des élections, abroger la censure, installer des syndicats, bref, laissez-nous déterminer leurs velléités, afin qu'ils ne déterminent plus les nôtres, laissez-nous demander à ces ignorants devenus dangereux ce qu'ils demandent, et nous épuiserons leurs cris. Car s'ils écoutent quelqu'un, ce sera quelqu'un qui les écoute. Le début des Droits Démocratiques, dont votre propre parti est le champion en Amérique et le sera dans le monde, ce dont il vous sera reconnu le mérite, sera la fin de la grève. La fin de la grève sera la fin des émeutes, ou, au pire, la division dans la canaille. Qu'alors l'armée sorte de l'ombre où elle aura été justement ménagée, et nettoie la minorité de trublions les plus acharnés au nom du gros du peuple, qui, poussé par le besoin et calmé par de raisonnables promesses, aura repris le travail. Le Shâh, honoré comme un monument, sera enfin utile. Mais l'économie, la vraie richesse du pays, sera enfin entre les mains de vrais spécialistes, rationnels et pondérés, qui sauront en partager le bénéfice pour le profit de tous.

La fraction armée du parti de la Raison lui tint à peu près ce langage : Sharifemâmi est trop mou. Il est vrai que l'armée est haïe ; mais elle l'est parce qu'elle accomplit la basse besogne de ce gouvernement dont elle est lâchement désavouée : si elle tire, l'armée est grondée ; si elle ne tire pas, elle est encore grondée. C'est la guerre ! L'ennemi est à l'offensive, et, stratégiquement, nous sommes mal disposés pour le recevoir : une nuée de négociateurs, qui ne veulent pas reconnaître que la guerre a commencé, parce qu'ils y perdraient leur emploi, nous entrave et favorise les gueux qui attaquent et s'infiltrent partout. Leur moral est gonflé par les défaites mêmes, le nôtre miné, tant que chaque jour nous serons obligés de nous laisser harceler, comme une armée d'occupation loin de ses bases. Le Shâh, qu'il vous faut soutenir maintenant, parce que vous aviez d'excellentes raisons de le faire au début de votre mandat, en annonçant qu'il ne violait pas les Droits de l'Homme, affirmation qu'il serait aussi honteux que dangereux de devoir rétracter, n'est faible que parce qu'à la vigueur des assaillants il ne répond pas par la vigueur de ses propres moyens, qu'un coupable scrupule empêche de déployer de façon à résoudre rapidement, plus par la peur que par un sang odieusement quotidien, cette rébellion grossie par la propagande arriviste d'une opposition pourtant impuissante à l'endiguer. Depuis 50 ans les Présidents des Etats-Unis n'ont investi en rien de plus qu'en l'armée, en Iran. Faut-il maintenant retirer ce merveilleux instrument, le laisser gagner par la corrosion jusqu'à une désintégration qui le retournerait contre ses propriétaires ? A quoi d'autre sert-il s'il ne peut maintenir l'ordre qui le justifie, autour de ses propres casernes ? Et puis, derrière les effarantes libertés que s'est prise la populace se miroite le communisme. Et qu'est ce que le communisme ? Le respect, l'autorité, sont déjà si entamés, que la propriété est comme abolie et tout Etat menacé. Et dans le meilleur des cas, l'Iran sera subordonné à votre rival, l'URSS, qui en est si voisin. La suprématie des USA, pour laquelle l'armée iranienne a coûté si cher, sera perdue, et les électeurs américains hasarderont pour la retrouver, tous les changements. Au contraire, laissez l'armée monter en première ligne, et nous reprenons l'offensive dans cette guerre d'extermination de tout ce qui nous fonde.

Mais alors que Carter hésite et refuse d'admettre l'urgence, l'offensive est toujours dans l'autre camp. Le 4 novembre, à Téhéran, l'armée tire sur une manifestation partie de l'Université. Les manifestants inaugurent alors une nouvelle tactique : ils forment des groupes de 100 ou 200, inattaquables dans les embouteillages chroniques de la ville, et attaquent des banques et l'Hôtel Intercontinental, QG des journalistes étrangers. Le lendemain, fiers d'avoir 72 martyrs, comme Hoseyn à Karbalâ, 60 000 insurgés, perfectionnant la tactique de la veille, détruisent banques, débits de boisson et cinémas, symboles de la dégénérescence anti-islamique, et je serais fort surpris, compte-tenu de l'ambiance, que le pillage ne se soit pas étendu au-delà. Au coucher du soleil, la statue du Shâh est déboulonnée ; un blindé passe et repasse sans intervenir dans cette fête. Des postes de police, l'ambassade de Grande-Bretagne, le siège de la SAVAK, le ministère de l'Information sont saccagés ; partout l'armée laisse faire.

Ce même 5 novembre, Sanjâbi refuse la direction du gouvernement. Car le lendemain, le Front National "doute que l'ordre puisse être maintenu". Ce qui en vérité signifie : le Front National sait que l'ordre ne peut pas être maintenu, par le Front National. Evidemment : l'armée triche ! Uniquement pour ravir le pouvoir aux bons démocrates, elle laisse ces barbares émeutiers dévaster et maîtriser le centre de Téhéran pendant deux jours, les renforçant ainsi dans cette dangereuse cohésion qui accroît encore leur irrespectueuse détermination ! Le dépit des démocrates de profession, relayé par les haut-parleurs de l'information internationale, s'oublia jusqu'à reprocher à l'armée de n'avoir pas commis un nouveau massacre les 4 et 5 novembre ! Pour une fois ils avouèrent franchement que le carnage de leurs ambitions leur est plus sensible que le carnage de ceux sur qui ces ambitions sont construites ! Ils appelèrent coup d'Etat d'extrême-droite le fait que l'armée ne bougea pas !

La fraction armée du parti de la Raison n'avait fait que la preuve qu'elle était devenue indispensable en première ligne ; et qu'il fallait donc lui donner la liberté d'y agir. Cette rude ruse qui ruina les plus savantes manoeuvres politiciennes, fut immédiatement récompensée. Le 6 novembre, les généraux Azhari, chef d'Etat-Major, nommé Premier ministre, Oveisi, administrateur de la loi martiale, nommé ministre du Travail dans un pays en grève, et Qarabâqi, nommé ministre de l'Intérieur dans un pays insurgé, reçoivent le soutien public de Carter. Le nouveau gouvernement monte au front, l'armée occupe tous les journaux, ferme toutes les écoles. Mais plus il arrive en vue du feu ennemi, plus son ardeur se tempère. Azhari, continuant les demi-mesures de Sharifemâmi, fait arrêter spectaculairement deux have-been piliers de l'Empire, Hoveydâ et Nasiri, ex-chef de la SAVAK ; et deux would-be piliers de l'Empire, Sanjâbi et Foruhar : les uns pensent que c'est pour préserver et grandir leur peu de popularité politique, les autres pour contenter à peu de frais les derniers et désespérés partisans du Shâh. Il est toujours plaisant, et le recul dans le temps souligne ce contraste, de constater quels calculs étroits et puérils peuvent amuser les plus hauts responsables ennemis à deux doigts de l'abîme. Clausewitz, à propos de la campagne de 1806, montre bien ce décalage entre les vieux officiers prussiens aux tics frédériciens et la jeune armée française qui vient les balayer. Le vieux Khomeyni s'y trompe moins : "Les jeunes ont refusé le Shâh."

Pour notre parti, où j'espère on m'excusera de m'être quelque peu appesanti sur les misères ennemies, car ce sont elles qui y furent le plus remuées, les 4, 5 et 6 novembre ont d'abord contenu une pleine journée d'impunité, largement utilisée. Car au moment où des manifestants savent se diviser en petits groupes de combat, il font la preuve de leur unité, pour même qu'une nouvelle tactique puisse être expérimentée, et avec succès, il faut un surcroît de confiance, réciproque et en soi. Cette journée révolutionnaire aura ensuite permis de mesurer le retard de l'ennemi qui réagit seulement deux mois après le Vendredi Noir, en abandonnant enfin les apparences de conciliation, qui étaient devenues une entrave si manifeste à sa nécessité quotidienne de réprimer. Maintenant, les jeunes, qui une fois encore ont tout fait, et qu'il est indécent de décrier comme étudiants, car beaucoup cessaient ce jour-là de l'être, savent qu'ils vont tirer ; et l'armée sait qu'ils vont descendre dans la rue.

Cet antagonisme simple et clair était pourtant loin de s'être frayé un chemin à travers la confusion des consciences : le Shâh, par exemple, le jour même où il instaure un gouvernement qui renforce rigoureusement la loi martiale, s'en excuse à la télévision en le promettant "provisoire", salue une "révolution nationale" qu'il exècre, et est à son tour salué pour sa "sincérité" par des politiciens libéraux qu'il persécute ; dans l'autre camp, même manque de coordination : le 4 novembre, jour même où commence la plus moderne des émeutes, s'arrête dans les champs de pétrole d'Abâdân, quoique très provisoirement, la plus moderne des grèves. Enfin, le 3 novembre, Khomeyni avait menacé quiconque collaborerait avec le Shâh ; les libéraux squeezés, qui n'ont jamais imaginé d'avenir sans le Shâh, diront que c'est cet interdit qui leur a fait refuser le gouvernement, parce qu'ils ont besoin de se montrer maintenant valets de Khomeyni pour espérer un strapontin dans l'opposition, depuis que l'armée le leur refuse au gouvernement ; et hors d'Iran cette même valetaille se lamente que l'extrémisme de ce même discours de Khomeyni profite à l'armée, et que l'extrémisme de l'armée profite à Khomeyni. Comme si l'armée ou Khomeyni faisaient à ce moment l'histoire, comme si les sauvages extrémistes de la rue n'étaient que manipulés entre une junte sanguinaire et un vieillard fou et irresponsable !

Avant janvier 1978, l'âyatollâh Khomeyni était inconnu dans l'histoire du monde. En janvier 1979, il était devenu l'homme le plus controversé du monde. Cette éblouissante carrière, à 78 ans, lui a attiré en même temps qu'une admiration qui allait jusqu'à l'idolâtrie, une jalousie et une haine qui ont atteint de nouveaux sommets dans la calomnie, dont les moyens ont si fort progressé depuis ceux auxquels les falsificateurs l'ont comparé, du Vieux de la Montagne à Hitler. Khomeyni a toujours été, et c'est son trait saillant, en cohérence obstinée avec sa religion. C'est l'impuissance à en critiquer la religion qui a fait la diffamation du bonhomme. Il a toujours été guide, et jamais autocrate, il a toujours donné des directives générales et rarement des ordres précis, lorsqu'il a un litige à trancher c'est en théologien, et souvent en théologien longtemps indécis, qui prend conseil. Il s'est toujours conformé à l'avis général, au consensus, et c'est ainsi qu'étant absent ou spectateur dans toutes les journées révolutionnaires, il les a approuvées, tant que la vague qui le portait ne refluait pas, observateur plus méticuleux que jaloux de sa popularité, suiveur plus dévoué que servile de l'avis de la majorité d'une population, non pas qui vote, mais qui descend dans la rue, comme celle d'Iran alors. Lorsqu'il a commencé à être entendu, il demandait avec fermeté la chute du Shâh, sans quoi il ne pouvait rien dire d'autre, et toutes les rues d'Iran pensaient déjà cela. Un homme aussi droit et aussi simple, aussi sincère et aussi cohérent, qui arrive aussi vite et aussi haut, est évidemment décrié par tous les carriéristes de moindre réussite, qui en se demandant avec aigreur comment il a fait, ne peuvent qu'imaginer qu'il est pire qu'eux. Il paraît incompréhensible aux domestiques de l'Etat, de l'industrie, de la culture, de la religion, qui en ont tous, d'arriver soudain, sans buts cachés. Car à tous les échelons de la hiérarchie, ceux qui l'admettent sont persuadés que s'ils n'y sont pas plus haut, c'est parce qu'ils sont encore trop bons.

Mais ce moine, porté puis établi au sommet de la plus grosse vague qui ait jamais grossi, n'a vécu que cette année en tant qu'individu, et y a peu fait. Car quoiqu'il le parut, il n'était pas révolutionnaire, quoiqu'il le devint, il n'était pas chef de parti, et quoiqu'il s'en soit toujours défendu, il a fini par passer pour politicien, homme d'Etat. Sa célébrité, qui est toute sa monstruosité, l'a privé de son individualité, l'a aliéné. L'histoire de notre époque est faite par des gueux, non plus par leurs représentants, chefs, guides. C'est l'inégalée puissance des gueux d'Iran le seul secret de l'inégalé succès de Khomeyni. C'est parce que le Vendredi Noir et les 4 et 5 novembre les gueux ont envahi Téhéran, que ce que Khomeyni dit (et répète justement les 6 septembre et 3 novembre) est entendu et non pas l'inverse. S'il est le sommet visible du raz-de-marée, sa limite, il n'en a jamais été le moteur. Ses cassettes, distribuées dans les mosquées, sont l'écho de ces émeutes. Mais c'est bien la rue qui produit ces cassettes comme sa réflexion, comme elle vient de produire le gouvernement militaire comme sa réaction. La vitesse et la pénétration des événements réussissent dès alors à transformer le dirigeant Khomeyni, un individu social de chair, d'os et de pensée, en image. Dans cette image hâtive et déformée (cf. : "L'Image de Khomeiny dans les titres à la Une de Libération" par Nushin Yavari) se lit en négatif ce qui la nécessite : l'image de Khomeyni est le premier esprit abstrait, la chose religieuse même, de la révolution iranienne, le concentré négatif de tous les esprits qui y sont attaqués, et notamment des marchandises. L'individu disparaît, en notre temps, à l'opposé de ce qu'il est, dans ce qu'il représente. Esprit, ambiance même, ne sont pas encore nus tant que des images d'individus les dissimulent. Les perdants du 6 novembre sont aussi ceux qui voient Khomeyni, devenu un complexe et obstruant concept, comme un de ces individus dont ils croient encore qu'ils agissent à leur guise et sont en mesure de maîtriser leur histoire.

Le 6, le 7 et le 8, jusqu'au 10 novembre, on se bat dans la plupart des villes d'Iran ; le 12, Deuil national (7e jour) et grève générale (un comité nie que l'opposition ait pu lancer un ordre de grève pour le 12, puisque "de larges secteurs du pays sont déjà en grève"), 30 morts à Khorramshahr, pillée, incendiée. L'armée traque les grévistes du pétrole, espérant sauver la boutique en sauvant la marchandise-vitrine. Mais même cette partie-là est déjà perdue : "Qui a donné le mot d'ordre de grève ? Personne en particulier, tout le monde est d'accord. Il n'y a pas vraiment d'organisation. C'est dommage. Mais à force de tirer sur nous, les militaires vont nous forcer à nous organiser et même à nous armer. Nous écoutons Khomeiny et nous lisons les tracts des Moudjaheddines." Les 19 et 20, 40 morts à Shirâz. Le 25 novembre, Mashhad est insurgée, et les premières désertions ouvertes commencent dans l'armée. Le 26, 500 000 manifestants occupent cette même ville. Plus les échauffourées prouvent que le gouvernement Azhari ne progresse ni n'impressionne davantage que son prédécesseur, plus la gravité de chaque accroc rend toute conciliation impossible pour le Shâh et inutile pour ses ennemis, et plus le présent semble aspiré par l'avenir. L'ombre du Moharram, mois des martyrs, s'étend comme un linceul sur novembre, creusant ses plis le long des virulentes imprécations de Khomeyni : "N'hésitez pas à verser votre sang pour protéger l'Islam et renverser la tyrannie" dira-t-il le 1er décembre. Puis : "le sang triomphera de l'épée."


Editions Belles Emotions
Du 9 janvier 1978 au 4 novembre 1979, par Adreba Solneman Précédent   Table des   matières   Suivant