B) D'octobre 1978 à octobre 1979


 

5) Insurrection de Managua (du 8 au 28 juin 1979)

La haine et l'impatience accumulées contre Somoza, l'exemple de León et d'autres villes de province, l'émulation au combat qui chez les enfants naît par jeu, l'habitude récente d'insubordination, sont le flot de causes immédiatement issues de son ambiance qui ont déterminé l'insurrection de Managua, auquel les appels sandiniste et à la grève sont des gouttes supplémentaires. Les prétextes sont inconnus. Et il ne faut pas non plus se représenter ce soulèvement comme coordonné par une traînée de colère, d'autant plus soudaine que longtemps retenue. Au contraire, dans quelques quartiers on s'y bat vivement dès l'annonce de la grève ; puis dans d'autres ; les 6 et 7 juin, une accalmie relative recharge les ardeurs ; pour le 8, on y rapporte de violents combats sans les situer ; le 9, tous les barrios périphériques de cette ville faite de barrios périphériques sont sous les barricades ; le 10, jour où la Garde Nationale reprend Diriamba, Jinotepe, Chichigalpa et tue 76 "sandinistes" dans Masaya, une colonne du FSLN vient prendre possession de l'insurrection de Managua. Ce n'est que bien après cette bataille, lorsque l'aveu ne peut plus nuire à son issue, que la direction sandiniste reconnaîtra avoir été obligée d'envoyer cette petite troupe dans la capitale, à la poursuite d'un mouvement qui lui échappait comme en Septembre. Les apologistes sandinistes, plus ultras que leurs idoles (qui, eux, doivent au moins user d'apparence de sincérité et d'humilité pour expliquer les faits à un public qui les a vécus), ne concèdent ce retard qu'avec beaucoup de reluctance, et uniquement pour les décharger de la responsabilité du massacre : si les gueux de Managua ne s'étaient pas révoltés au mépris du plan sandiniste, avaient obéi aux ordres, ils ne seraient pas morts.

Les pauvres, si nombreux en notre temps, à penser un petit peu mieux - un petit peu moins bien, et donc à se croire pro-révolutionnaires en préférant gauche à droite et beaucoup de gauche à un peu de gauche, s'indigneront de dénombrer dans ces lignes plus d'anti-sandinisme que d'anti-somozisme. Mais il ne s'agit pas ici du choix électoral de tel ou tel gestionnaire de la paix civile qui menacera ou non durant son indifférente magistrature tel ou tel détail du confort de la survie. Il s'agit de la guerre. Il s'agit d'ennemis ou d'amis, mais pas de plus ou moins. Les partis ennemis y sont complémentaires. Les gueux du Nicaragua ont achevé en actes la critique du somozisme. Ceux qui voudraient aujourd'hui l'entendre répéter sans fin, sont ceux qui craignent de la voir dépasser. Ce dépassement commence dans la démarcation systématique entre le FSLN et les gueux. La première insuffisance des gueux est d'avoir permis aux sandinistes d'effacer la ligne de front qui passe entre eux. La deuxième, qui justifie ce que j'écris, est que cette insuffisance n'a pas encore été critiquée. Le parti gueux ne respire que par la critique. Et ce que je dis est donc qu'à cette révolte il n'a manqué qu'autant d'anti-sandinisme qu'il y avait d'anti-somozisme pour devenir une révolution.

Managua contient presque toute la richesse moderne, tout l'esprit du monde qui traverse le Nicaragua. A Managua, il y a télévisions, téléphones, aéroport international, grands hôtels, banques, ambassades, ministères et Somoza en personne ; il y a des ouvriers, des supermarchés, de l'argent. Mais pour le monde, Managua est une des plus petites capitales, obscure et reculée. En 1978, sa population est estimée entre 250 000 et 600 000 habitants ; le milieu, 400 000, paraît le plus probable. Rien n'exprime mieux le mépris pour ces habitants, mais aussi la difficulté de les contrôler, que cette différence d'estimation, du simple au triple. La superficie de Managua est de 100 km2, comme Paris intra-muros. Mais dans Paris intra-muros dorment la nuit six fois plus et se déplacent le jour quinze fois plus de pauvres. A Managua, la moitié seulement du terrain est construite. La raison principale date du tremblement de terre de 1972 qui a détruit le centre de la ville : Somoza, pour que la reconstruction vienne sur les terrains qu'il possède à la périphérie, y interdit le centre dévasté, qui part à l'abandon. Aussi, Managua double de surface en cinq ans, envahie par les terrains vagues, eux-mêmes grignotés par l'urbanisme sauvage, coquille d'une prolifération indomptable. Michel Foucher, géographe pro-sandiniste, mal informé de l'insurrection qu'il prétend y expliquer, décrit plus justement la ville : "Il n'y a guère de ville en Amérique latine qui ne laisse autant cette impression de désolation, au point que les quartiers "marginaux" rassurent, dans une certaine mesure, parce que le visiteur y retrouve de la vie, au moins de l'animation." Comme il n'y a pas de rues, seulement quelques routes et beaucoup de chemins défoncés par les pluies, il est aussi difficile de s'y déplacer que d'y compter les habitants.

On peut diviser Managua en quatre : 1- L'ancien centre avec la cathédrale et le Palais National, le Bunker de Somoza et la lagune, l'Intercontinental, est prolongé au sud et le long de la route de Masaya par l'Université et les quartiers de valets cherchant l'altitude comme à Téhéran. 2- Une zone autour de l'ancien centre qui, à l'est des principales failles sismiques, forme un quadrilatère ayant pour côtés la Pista de Enlace, la Carretera Norte, la piste suburbaine et la route de Masaya (les deux autres routes de la ville sont la vieille et la nouvelle route de León, à l'ouest) : les maisons y sont construites en dur, c'est l'ancienne périphérie de Managua, érigée entre 1950 et 1966, devenue tampon entre les quartiers de valets et les barrios sauvages, comme sa population, constituée des valets les moins bien payés et des pauvres les plus âgés. 3- Les barrios que j'appelle sauvages regroupent la moitié des habitants de la ville et sont principalement constitués de constructions en bois où "les compagnies de lotissement ou les propriétaires de terrain n'ont pas réalisé avant la location ou la vente l'infrastructure minimale : voirie, eau, électricité, éclairage public, écoles, dispensaires..." Ces barrios couronnent l'ouest et l'est de la ville, mais sont séparés entre eux au sud, au centre et au centre-est, par les zones déjà décrites, et quoique denses en eux-mêmes, sont coupés par le vert si gris des terrains vagues. 4- Enfin, les bidonvilles récents séparent la ville du lac, sur une mince bande au nord ("rives inondables du lac, débouché des égouts et même, comme à El Rastro, localisation sur une décharge publique"). Mais il y a fort à parier que des bidonvilles se sont partout construits en lisière des barrios sauvages, comme des maisons en bois se sont partout imbriquées dans des maisons en dur. Ainsi, squatters, migrants, saisonniers rendent-ils aussi mouvantes les limites du dessin en damier des barrios, que le tremblement de terre qui l'a éventré, puis ses conséquences spéculatives, étalé.

A un centre léthargique qui est un désert s'oppose une périphérie au bouillonnement ininterrompu. Les communicants sont là mais les voies de communication sont asséchées. Chaque barrio périphérique est un foyer d'intelligence, très jeune, très fraîche, étouffé par la morosité, le silence, la nature. Tout ce qui est vivant dans cette ambiance singulière est neuf. Car si le Nicaragua n'a pas d'histoire, les jeunes de Managua, dans les maisons en bois et les bidonvilles, n'ont pas même de passé. Ici, passé et histoire sont dans les rêves. Le rêve et l'insaisissable marchandise sont les seuls moyens de communication qui traversent sans cesse les terrains vagues, la vérité de l'esprit de Managua. Ni la conscience ni l'Etat n'arrivent à s'emparer de cette succession d'îlots. Managua est une ville difficile à dominer en entier, difficile à administrer : le centre ne permet pas de la tenir, il est l'arrière-cour, et si les gueux ne se fédèrent pas parce qu'il n'y a pas de couloirs entre les barrios périphériques, pour cette même raison, les valets doivent occuper, puis tenir chaque barrio périphérique.

Cette difficulté à administrer Managua, FAO et FSLN la reconnaissaient dès septembre ; et Somoza a alors fait connaissance, sans conscience, de sa propre insuffisance, cet esprit particulier de Managua qui semble naître ex nihilo, hume la richesse avec le flair d'un loup affamé, et, en attendant, se nourrit de licence et de haine. Car la seule trace, encore bien fugitive, d'histoire dans l'esprit de Managua, est l'histoire présente, depuis janvier 1978. Les gueux des barrios périphériques se sont battus en septembre, mais comme on se bat sans sandinistes. A l'exception des insurrections de Monimbó et Matagalpa, les gueux ne s'emparent jamais d'un territoire pour le défendre : à Managua, ils attaquent en construisant des barricades, en combattant la Garde Nationale, puis disparaissent au bout de quelques heures pour recommencer le lendemain, un jour ici, un jour là, selon l'exaspération du moment, rarement les mêmes, jamais prévisibles. En septembre, ils n'ont jamais su coordonner cette petite guerre urbaine. Le FSLN prétend précisément à cette coordination, en tant que spécialité hiérarchique. Il transforme l'insaisissable insurrection en point de mire, la véritable guérilla urbaine en spectacle de guerre conventionnelle, les jaillissements épars de critique en une fosse commune. Or, ce 9 juin, pour la première fois, tous les barrios de Managua sont insurgés en même temps. L'autorité de Somoza s'est beaucoup effritée depuis septembre ("Chaque quartier comptait des représentants du pouvoir, des informateurs, et au moment du soulèvement populaire, un nombre important de civils en armes, les sapos = crapauds, ont fait beaucoup de victimes"). C'est pourquoi, lorsque la police somoziste ne suffit plus à contrôler la ville, parce que, dans l'écheveau des barrios elle ne sait plus où frapper, la police sandiniste arrive en renfort au pas de charge pour le lui montrer.

Le sandinisme, incontestable, de sa population mérite ici une parenthèse. L'enthousiasme des insurgés les plus jeunes se donnait volontiers le nom de sandiniste, synonyme d'anti-somoziste. Mais l'anti-somozisme de ces gueux consistait dans le désir de richesse, justement cet enthousiasme, le contraire des besogneux calculs politiciens et des corsets idéologiques mal boutonnés des carriéristes du FSLN. Tout l'enthousiasme qui a paru dans le triste FSLN n'est que celui qui rejaillit de ces sympathisants. Les sandinistes ont exploité avec habileté cette confusion sur le terme sandiniste, en évitant toute discussion sur son contenu, comme s'il allait de soi. Ces retors valets voyaient bien la contradiction entre le sandinisme plus criard que profond, fondé sur un mythe, un rêve de gueux, et leurs propres buts au nom du sandinisme quand ils disposeraient des moyens coercitifs de l'Etat ; tous les pauvres du Nicaragua pensaient comme eux, puisqu'ils agitaient leur drapeau. Quant aux gueux, ce sandinisme superficiel ne les transforme pas en valets, mais révèle une fois de plus leur ignorance, leur bonne foi, leur misère théorique. Il est, d'ailleurs, impossible de décrire le gueux modèle, comme il y a cent ans, l'ouvrier modèle. La maladie commune des gueux, qui défigure l'un, ratatine l'autre et mutile le troisième, l'aliénation, les rend très dissemblables. Ce ne sont que leurs très nébuleuses et impalpables perspectives dans la communication qui leur confèrent leur unité à la guerre. Ainsi, comme certains ont une couche de religion, d'autres croient adorer le travail, d'autres encore sont fétichistes de l'histoire, des voyages, de la musique, du sport ou de la baise. Au Nicaragua, beaucoup de gueux se croyaient sandinistes, parce qu'ils n'imaginaient même pas que les héros spectaculaires de l'anti-somozisme pouvaient partager des illusions contraires aux leurs. Et nulle part plus qu'à Managua, les sandinistes n'ont redouté, et donc tardé à côtoyer ces jeunes sauvages, qui plus que les autres Nicaraguayens ont senti passer la richesse, la pratique du monde, l'esprit du temps sous des formes qui rendaient vétustes les théories sous-développées du FSLN. Et remarquez, s'il vous plaît, que les pauvres d'un pays réputé arriéré se sont révoltés de la façon la plus moderne. Le parfum le plus fugace de richesse aliénée a suffi à provoquer leur érection. Ils peuvent servir d'exemples, d'avant-garde, pour parodier le vocabulaire de leurs ennemis, à tous ces pauvres si habitués à être si écrasés par une richesse qui leur échappe, qu'ils s'y sont souvent résignés.

Leur impuissance, en Septembre, à exposer au massacre les gueux de Managua comme ceux des autres villes, rend la capitale d'autant plus redoutable aux sandinistes en juin. C'est ce qui justifie le changement dans leur plan stratégique officiel par rapport à Septembre : Managua, maintenant, ne doit tomber qu'en dernier, comme une feuille morte. Aucun de leurs apologistes ne s'est étonné d'un projet aussi singulier. Toutes les révolutions modernes, de 89 à Téhéran, se décident par des insurrections dans les capitales, et voilà un parti, qu'ils reconnaîtront comme révolutionnaire, qui voudrait retarder, contourner, voire faire l'économie de ce soulèvement décisif ! Et pendant que les guerilleros, qui craignent autant Managua que la révolution, battent la campagne, le 8 juin, les gueux de Managua commencent à produire la dernière pièce du puzzle de Septembre. Mais comme Managua a manqué à Septembre, Septembre va manquer à Managua : les gueux des autres villes, saignés, sont beaucoup plus faibles, et l'ennemi sandiniste est beaucoup plus fort. Il n'empêche que les vingt jours que va durer cette insurrection urbaine constituent le paroxysme du débat entre gueux et valets et le point culminant des premiers sur le front d'Amérique centrale.

Il faut bien supposer que le FSLN n'avait quasiment pas d'adhérents à Managua, puisqu'il est obligé d'y parachuter au sens figuré, une colonne les 10 et 11 juin. Black nous apprend que c'est un directoire de 3 personnes du "front interne", un commandement militaire joint de 3 "comandantes" et une commission politique de 5 membres, qui sont venus déterminer, au mépris des combattants, de leurs méthodes de combat, de leur organisation et de leur avis, un périmètre de 25 barrios à occuper. Il s'agit des "barrios orientales" construits en dur et qui séparent le centre des barrios sauvages périphériques. Foucher s'interroge au moins sur le choix de ce lieu d'encrage : dans les barrios extérieurs, où le FSLN aurait rencontré plus de ferveur, il aurait été obligé de s'abriter des balles derrière des maisons en bois, et se serait vu isolé par des terrains vagues ; alors que ce périmètre entre quatre routes est "un des rares, sinon le seul lieu d'où il était possible de progresser vers les deux objectifs situés au centre : le Bunker et l'Hôtel Intercontinental". Mais la ferveur des barrios périphériques est bien tout ce que le FSLN redoute et abhorre. Ensuite, le FSLN est venu dans le quartier des petits valets parce qu'il y est chez soi : si "classes moyennes" a un sens, c'est à la fois l'origine des chefs sandinistes et les habitants de ce quartier. Enfin, il est bien probable que cette garnison soit venue s'installer là pour pouvoir contrôler les voies d'accès : et de fait, il ne s'agissait pas tant de progresser que de filtrer toute progression vers les objectifs situés au centre.

Mais Foucher ne va pas jusqu'à s'interroger sur les raisons de choisir une tactique aussi discutable que de s'emparer d'un périmètre et d'en faire le point de mire du massacreur déclaré de ses habitants. Le premier effet fut d'y attirer, loin de leur terrain, les jeunes les plus combatifs qui achetèrent par leur subordination à la hiérarchie du FSLN l'espoir de livrer là la bataille décisive contre le vieux monde, tout entier représenté par Somoza ; et il était plus facile à l'arrivée des sandinistes de se jeter dans leur zone de concentration que de prévoir, qu'encerclée quelques jours plus tard, il serait impossible d'en sortir. Le second effet fut donc d'affaiblir l'insurrection dans les barrios périphériques, désertés par ces combattants-là. Et à aucun moment le FSLN ne pratiqua, ni même n'envisagea la tactique consistant à bouger beaucoup et vite, à masquer la population locale par des opérations éclair, à faire surgir une barricade soudain puis à disparaître soudain, à harceler l'ennemi par petits groupes jusqu'en plein centre, à le démoraliser comme les insurgés le faisaient avec bonheur avant l'arrivée des stratèges du FSLN.

L'insurrection de Managua, l'imprévu et l'indécis, sont désormais la mesure de toute chose au Nicaragua. Depuis l'arrivée des sandinistes, elle se divise en deux temps, du 10 au 19 juin environ, où les gueux de Managua sont à l'offensive, et de là jusqu'au 28 juin, où se développe la contre-offensive. Pendant la première période, les informateurs, incapables de rendre compte de la bataille même qu'ils ont sous les yeux dans la capitale, ne peuvent livrer sur le reste du Nicaragua que des rumeurs. La Garde Nationale prétend avoir repris Chichigalpa, Diriamba, Jinotepe et Masaya ; le FSLN prétend également avoir pris Masaya, León, Chinandega ; on se bat encore à Esteli, et, sans doute, aucune de ces villes n'est encore franchement aux mains de l'une ou de l'autre armée. Le 11 juin, Somoza reconnaît déjà 1 200 à 1 300 morts dont 300 gardes nationaux.

A Managua, quoique affaiblie par le point de fixation sandiniste, piège dans lequel de nombreux jeunes se sont rués, otages aussi volontaires qu'inconscients, l'insurrection des barrios périphériques continue pendant toute la première période. Garde Nationale et FSLN ne s'affrontent pas, sauf pour occuper et user leurs plus fraîches recrues, ils ne sont pas face à face, mais dos à dos, tous deux en défense. Le FSLN, en effet, ne semble se préoccuper que d'intensifier l'organisation et la subordination de sa zone ; la Garde Nationale met cette diversion sandiniste à profit pour organiser la répression contre les insurgés des barrios périphériques. "Or tous les quartiers populaires ne furent pas des espaces de lutte" soutient Foucher, "Celle-ci se limita pratiquement aux quartiers "orientaux", et même à certains d'entre eux". Le servile géographe, dont toutes les sources sont pro-sandinistes, doit être ici traité de menteur. Ce sont les sandinistes qui se limitèrent à certains quartiers "orientaux". Mais contre Somoza, tous les quartiers "populaires" furent des "espaces de lutte", sans exception. Entre une foule d'autres témoignages, il aurait suffi au menteur de lire son quotidien préféré, qui signale un exode des quartiers sud et ouest le 11 juin : ce n'est pas parce qu'on ne se bat qu'à l'est ! Même par Moïse Hassan, chef du MPU, il aurait du apprendre combien les luttes dans les barrios périphériques, quoique obscures, ont été ardues, indécises, acharnées : "La zone libérée est défendue par les éléments du Front les mieux entraînés, les mieux armés. La Garde n'est pas parvenue jusqu'à présent à démanteler les barricades qui se trouvent dans cette zone centrale. Elle renverse les barricades de la zone périphérique dans la journée, mais elle abandonne le terrain ensuite, car elle ne se bat pas la nuit." Dès le 11 juin, l'aviation bombarde la ville et détruit complètement le bâtiment de La Prensa (grand scandale) qui se trouve sur la Carretera Norte, route qui relie le Bunker à l'aéroport de Las Mercedes, et que la zone sandiniste coupe. Accessoirement, cette aviation bombarde aussi les barrios périphériques (silence de mort).

Au moins tacitement, le FSLN est venu épauler la Garde Nationale, partager les tâches de répression avec elle. Comme en Septembre, c'est la raison principale d'un carnage qui fait oublier Septembre. C'est ici, où les valets n'ont pas choisi de se battre, le contraire du Frente Sur : avant que les deux armées ne puissent monopoliser le combat en s'attaquant, elles sont durement chahutées, et doivent faire fondre au canon des masses importantes de "civils" interposés. C'est pourquoi il n'y a que Le Monde qui voit effectivement le FSLN avancer, le 13 juin, à un kilomètre du Bunker, et le 14, "les guerilleros contrôlent presque la moitié de la capitale". Il y a là assimilation des guerilleros aux combattants anti-somozistes, car d'après tous les autres apologistes, la zone que Moïse Hassan appelle "libérée" ne dépasse jamais les 6 km2 (sur 100 que compte la ville).

Le FSLN, dans sa zone, s'est comporté en armée d'occupation sur un territoire conquis. Ni la population de cette zone, ni les auxiliaires, appelés milices, et accourus d'autres quartiers, n'ont jamais été même consultés sur les décisions qui les concernaient au premier chef, à commencer par la façon de décider cette bataille, de mener cette guerre. Je ne pense rien exagérer en affirmant que les sandinistes ont dévoué moins d'efforts à attaquer et à nuire à Somoza, qu'à administrer et endoctriner la zone qu'ils eurent si autoritairement sous leur coupe. "The insurrection" (et quand cet apologiste parle d'insurrection, c'est avec le même cynisme réducteur que celui de Moïse Hassan, quand il qualifie de "libérée" la zone sandiniste) "was divided into hundreds of small interlocking areas, each under command of an FSLN militant responsible for a given number of barricades and roadblocks and for the civil authority in conjunction with the local CDCs". Voilà pourquoi le FSLN n'a occupé qu'un si petit territoire quand la moitié de la ville était insurgée : il était limité par le nombre de ses militants. Le FSLN ne pouvait venir dans un quartier où l'autorité civile lui échappait. A juste titre, cette police ne pouvait faire confiance à une population qu'elle exposait à l'ennemi et mettait à contribution. "Les guerilleros arrivés le 11 juin nous ont obligé à creuser des tranchées. Au début nous fermions les portes et nous nous barricadions dans la maison, mais peu à peu, nous nous sommes habitués et leur avons donné la nourriture quand ils le voulaient..." Que, dans ce quartier petit-bourgeois qui leur ressemble tant, les sandinistes aient pu enrôler n'est pas à mettre au crédit de leurs discours, mais plutôt à la honte de ces enrôlés : en d'autres guerres, pas si éloignées, ceux qui travaillent avec une armée qui prive de décisions la population chez qui elle vient faire la guerre, sont appelés des collabos. Recréant une pyramide sous la leur, ils ont instauré des milices d'adolescents précoces, qui leur servirent de tampon, aussi bien sur les barricades extérieures de leur périmètre que dans l'exercice de la tyrannie effective sur le reste de la population : "Plus tard raconte l'homme "des brigades de jeunes du quartier se sont formées, et ils ont commencé à nous traiter avec mépris. Ils nous donnaient des délais pour finir de creuser les tranchées, et si quelqu'un refusait, ils le menaçaient avec leurs armes"..."

Rien ne distingue mieux les gueux et les valets, et ne trace plus éloquemment la frontière qui les sépare, que leur attitude respective pendant cette bataille face à la richesse faite chose, la marchandise. Les gueux cherchent spontanément à la supprimer, et les valets, tout aussi spontanément, à la conserver. Cela commence avec les valets de plume, scandalisés : "Pour le reste, Managua vit une confusion totale. L'économie du pays est complètement arrêtée et la Garde Nationale laisse en plein jour se perpétrer le pillage des magasins d'alimentation et des supermarchés." Ce journaliste de gauche est tellement offusqué de ce malheur pour la marchandise, qu'il reproche à la Garde Nationale de ne pas assez faire la police ! Comme on ne reproche pas aux enfants des autres de se toucher le sexe, mais à leurs parents de ne pas leur taper sur les doigts, il ne reproche pas le pillage aux pilleurs, mais aux valets de Somoza de le tolérer (sous-entendu, par démagogie ; les puritains sandinistes, eux, sont trop loyaux pour permettre pareil plaisir populaire. Cette insinuation moraliste ne manque chez aucun chroniqueur.) Le Monde du 19 juin renchérit : "Il n'y a pas un seul supermarché intact... Les pharmacies sont également attaquées, parfois par le Front Sandiniste." Si notre valet de plume était dans la zone sandiniste, il saurait que le FSLN ne pille pas, il réquisitionne. Il ne supprime pas l'échange marchand par une joyeuse et sauvage destruction, il le retranche, préventivement d'abord, pour éviter cette joyeuse et sauvage destruction, et ensuite pour le transformer en autorité par la redistribution sélective des marchandises confisquées. Et l'illégalité de l'opération se justifie par le besoin. Je voudrais à ce propos réfuter le plus répandu des leurres économistes comme quoi le pillage serait un effet du besoin, et plus particulièrement de la faim. Des millions d'humains meurent de faim, sans qu'il leur vienne à l'esprit de piller ; et des millions d'humains pillent sans avoir faim. D'ailleurs, à Managua, en juin 1979, où la nourriture se fait rare, les pauvres pillent tout ce qui leur tombe sous la main, et ce n'est pas dans l'espoir de l'échanger contre du pain. Quiconque a participé à un pillage sait que l'aléatoire y abolit le calcul. C'est un plaisir, non exempt de frénésie, parce que cette rencontre sans intermédiaire entre pauvres et richesse aliénée renverse leur rapport de force, dépouille la chose de la richesse pour parer ses destructeurs du jeu de sa destruction. "Le pillage familial, perpétré avec l'assistance de la grand-mère et des enfants se généralise." "The militias prevented neighbours from looting luxury goods. Expensive stereo goods, colour TVs, electric fans, all sorts of household goods were destroyed by those in charge of keeping order." "At the entrance of the Casa Pellas - a conservative owned commercial center - a National Guard major charged an entrance fee to any civilians wishing to join the military in the looting ; at the La Colonia supermarket, the military special offer was a full trolleyload of goods on payment of 1 000 Cordobas." Paupérisme autoritaire sandiniste et capitalisme sauvage somoziste sont les variantes respectives improvisées par les deux partis valets à la rescousse de la marchandise, leur maîtresse en péril : les eunuques du FSLN préfèrent la détruire avant qu'elle ne soit profanée par le pillage, alors que les maquereaux de la Garde Nationale rackettent son viol, impôt improvisé ou nouvelle méthode de vente, turbulente et approximative, mais qui lui sauve la valeur.

Daniel Ortega, Violeta veuve Chamorro, Alfonso Robelo, Sergio Ramírez et Moïse Hassan constituent la Junte de Gouvernement bon chic bon genre que le FSLN présente le 16 juin sans avoir pu reprendre Rivas. Un geste aussi responsable et modéré lui permet de recevoir le renfort politique des Etats du "Pacte Andin" qui le reconnaissent comme "belligérant". Les uns après les autres, tous les Etats du monde vont lâcher Somoza pour le FSLN.

Dans Managua se termine la révolte des barrios périphériques, faute d'armes, de médicaments, de nourriture, de théorie, de vivants. L'eau et l'électricité sont coupées (Somoza en promet le rétablissement aux quartiers qui se laissent pacifier), les ordures s'amoncellent, "il semble que de chaque côté les exécutions sommaires soient monnaie courante", les cadavres pourrissent dans les rues, la chaleur est écrasante, les bulldozers, l'artillerie et l'aviation reviennent à l'assaut chaque jour. La Croix-Rouge de la capitale s'annonce débordée par 30 000 réfugiés. Rien que la première moitié de l'insurrection de Managua aurait déjà fait plus de morts que tout Septembre dans tout le Nicaragua. Abandonnés par l'histoire officielle, les héros anonymes de Monseñor Lezcano à Las Americas qui ont amené la révolte si près de l'Intercontinental que l'information ennemie s'en est trouvée interdite, dans les bégaiements amplifiés de celle-ci et par leur mort, ont eu le mérite d'établir la vérité varsovienne de Septembre ; et commis la faute de rêver jusqu'à la dernière balle d'un soutien valet. Somoza, qui sait bien avant eux que jamais les sandinistes ne leur enverront de renforts, et qu'ils ont eu tort de ne vouloir que garder leur quartier, commence maintenant à attaquer le périmètre policé par le FSLN. Contrairement au Vendredi Noir de Téhéran, où la bataille obscure s'est déroulée après le massacre spectaculaire et l'a dépassé, la bataille spectaculaire de Managua se déroule après le massacre obscur, et en aliène l'intelligence.

"Cinq jours après le début de la contre-offensive de la Garde Nationale contre la zone de la capitale occupée par les sandinistes, ceux-ci ont perdu un peu de terrain, mais leurs défenses principales n'ont pas été touchées." Sur les 25 barrios qu'ils contrôlaient au début, les sandinistes en tiennent encore 18 vers le 24 juin. Tous les jours, artillerie et aviation somozistes bombardent, et depuis le 23 juin des hélicoptères lancent des bombes de 250 livres de 1 000 mètres d'altitude, ce qui est aussi meurtrier qu'imprécis.

C'est à partir du début de cette contre-offensive qu'il faut situer les dissensions entre adolescents précoces et attardés, sur l'organisation du combat dans la zone sandiniste, d'où il était déjà impossible de sortir. Il est très difficile de connaître ce débat, essentiel, puisque le seul qui y a fait allusion est l'ultra-sandiniste Black, apparemment poussé à la révélation par le souci du détail, qu'il croit anodin : "Disturbingly, there were problems in the military balance between "regular" and "irregular" combattants : ... the militias felt jealous and marginalised." A partir du 18 juin, les milices n'ont plus de munitions, et celles prises à l'ennemi ne sont pas assorties à leurs armes. "With the militias reduced to secundary guard duties, a crisis of discipline arose." Malheureusement, cette dispute entre soldats jaloux de leurs armes et auxiliaires désarmés, vient un peu tard : elle commence au moment où les gueux des barrios extérieurs sont battus. Et apparemment elle ne concerne même pas encore l'absurde défensive imposée à ce périmètre exposé, mais le refus de servir de chair à canon sans pouvoir se défendre, et l'égalité d'usage des armes de tous les combattants, un vague début de critique de la hiérarchie. Mais ce sont aussi les funérailles de l'image idyllique du peuple derrière son FSLN chéri. Et il faut bien supposer que ce qui s'est passé à la lumière de Managua, vraisemblablement minimisé par Black, a été la règle dans la pénombre de Septembre, tant les intérêts des gueux insurgés sont en contradiction avec les intérêts des valets sandinistes, dans une situation historique, c'est-à-dire où la vérité va plus vite que le mensonge.

Ces milices sont les hezbollahis de la révolte du Nicaragua. Sensibles à l'idéologie des récupérateurs quand ils y entendent leur propre négativité, ils sont aussi faciles à enthousiasmer quand il s'agit d'outrer que difficiles à juguler, à discipliner. Ce sont là les sauvages modernes ; mais chez qui le goût de la vie et le courage suppléent à l'ignorance, et à l'habitude de prendre des coups. C'est avec eux qu'il faudra compter pour que le monde change. Ennemis de l'esprit, en tant que pratiquant la communication à leur place, ils sont, sans en avoir conscience, le noyau irréductible du parti de la subjectivité, du parti de la conscience.

"The Frente admitted they had miscalculated the strength of resistance they would encounter in the capital." Détournons une fois de plus ces phrases ambiguës d'apologiste. Celle-ci signifie bien entendu que le FSLN fait amende honorable (le FSLN est très fort pour les amendes honorables), qu'il avait sous-estimé les forces somozistes dans la capitale. Quelle absurdité ! Les forces somozistes n'ont pas changées depuis le 8 juin, date à laquelle les sandinistes en connaissaient la force. C'est donc bien la force des gueux qu'ils ont sous-estimée. L'indiscipline des milices, qui doit leur rendre impossible même l'administration de leur petit territoire doit cesser si possible sans s'ébruiter : il faut donc que ces indisciplinés meurent. Comme en Septembre, les sandinistes vont donc quitter la ville en laissant derrière eux, sans armes, ces adolescents précoces qui se sont beaucoup montrés à l'ennemi. Si jusqu'à présent toutes les retraites sandinistes abandonnant une ville insurgée au nettoyage ont paru rocambolesques, pour ne pas dire suspectes, celle de Managua est impensable sans la complicité de Somoza.

Le 26 juin, la Garde Nationale, attaquant par l'Est, parvient à prendre Bello Horizonte, enfonçant un coin dans le périmètre sandiniste. La nuit du 26 au 27, la ville est bombardée sans discontinuer. Le 27, la Garde Nationale aurait repris plusieurs rangées de barricades avec un tank Sherman sur lequel des otages civils sont assis. ("Le même procédé aurait été utilisé en avril pour reprendre le quartier de San Judas.") Dans la nuit du 27 au 28, 6 000 personnes commenceraient le "repli tactique" à travers les barrios d'El Dorado, La Nicarao, Luis Somoza, 14 de Septiembre, tous tenus par la Garde Nationale. Cette troupe immense va à Masaya. Masaya semble avoir été conquise début juin par le FSLN, reconquise par la Garde Nationale, reprise par le FSLN le 19 juin, puis à nouveau par la Garde Nationale, pour tomber enfin au pouvoir du FSLN le 25 juin, une garnison somoziste demeurant toutefois réfugiée sur la colline voisine d'El Coyotepe, d'où elle bombarderait cette ville. On conçoit qu'elle a été bien purgée de gueux, c'est-à-dire d'anti-somozistes ayant des velléités d'indépendance par rapport aux sandinistes. C'est à Masaya que Moïse Hassan nomme le premier conseil local ; c'est à Masaya, également, que le premier comité de quartier indépendant devient un comité de mouchards sandinistes : c'est la première débaptisation d'un CDC, Comité de Défense Civique, en CDS, Comité de Défense Sandiniste ; enfin, comble de la mise au pas, "In Masaya too, one of the Revolution's key slogans first emerged : "Raise Production !"" Rien d'étonnant donc à ce que, plutôt que d'envoyer en renfort à Managua la garnison de Masaya, les sandinistes aient décidé le massacre des rebelles de Managua, en se retirant parmi les esclaves de Masaya. Managua et Masaya ne sont distantes que de 31 kilomètres.

Les 6 000 retraités sortis d'une manière aussi extraordinaire de Managua, auraient pris trente heures pour couvrir ces trente et un kilomètres. Cette lente retraite n'aurait vu mourir que 6 personnes ! Je voudrais bien qu'on m'explique pourquoi l'aviation de Somoza, qui bombardait sans retenue la capitale de son Etat chaque jour depuis treize jours, n'a pas, pendant ces trente heures anéanti cette longue colonne, qui marchait tranquillement sur le terrain absolument découvert qui va de Managua à Masaya ! Qu'est-ce que la Garde Nationale avait de si important à faire, ce 28 juin, sachant que le nettoyage de l'ex-zone sandiniste n'a commencé que quelques jours plus tard, pour ne pas poursuivre, sur cette route, avec toute l'artillerie qu'elle utilisait dans la capitale, un ennemi si démuni, si découvert !

On pourra toujours lire, tant qu'elle ne sera pas retournée contre ses auteurs comme un crachat qu'elle est, l'insolente ineptie, comme quoi les sandinistes seraient noblement venus à la rescousse de l'insurrection de Managua pour éviter le massacre de la population civile, et l'auraient noblement quittée, pour la même raison. La Croix-Rouge, peu adepte, ce me semble, d'exagérations, déclare le 25 juin, que les seuls combats (donc avant leur fin et le nettoyage) ont fait 10 000 morts, soit un Managuayen sur quarante. Merci au FSLN ! C'est à son calcul responsable et réfléchi du sang d'autrui que nous devons cet excellent score !

"Mais le Front aurait pu choisir de s'accrocher de longs jours dans l'attente de renfort" : le 1er juillet, le journaliste du Monde n'a toujours pas compris ; les gueux de Managua, si : "la population ne croit pas à un repli tactique", mais trop tard : "Pendant tout le temps qu'a existé la "zone libérée" de Managua, le Front a mené une intense activité politique, organisant des "comités de défense" par blocs de maison, tenant des réunions, invitant tout le monde à une fête lorsque l'avion sandiniste avait réussi, en pleine nuit, un largage de munitions. Durant toute cette période, des hommes et des femmes ont activement soutenu ces tâches civiles, et y ont participé. Ceux d'entre eux qui rentrent dans les quartiers feront l'objet d'une répression sans merci, de même que les familles des "muchachos" qui, presque tous, se sont battus dans leurs propres quartiers au milieu des voisins qui les connaissent." Ceux qui seraient partis ne seraient que quelques centaines, d'après les habitants, et non pas 6 000, comme pour Black. Cette année, la Garde Nationale "procède avec méthode. Elle prend deux ou trois jours pour dresser, avec l'aide des mouchards, une liste d'activistes. Ceux-là sont ensuite sommairement exécutés ou torturés s'ils ont quelque chose à révéler."

Esteli, en Septembre, avait été la preuve qu'un mort pour quarante survivants ne donne même plus neuf mois de répit avant une nouvelle génération spontanée de furieux sans cervelle, de braillards sans langue, aux rites expurgés et nouveaux. Et toujours, les vainqueurs traiteront Managua en monstre qui somnole dont les incompréhensibles pauvres n'ont pu être abrutis et hébétés par une série suffisante d'électrochocs, comme ceux d'Esteli et de Masaya qui ânonnent maintenant le slogan sandiniste "patria libre o morir", pour ne pas mourir.

L'étendue du carnage n'est que l'ombre portée de la soudaineté et de la profondeur du soulèvement. A la fin de cette bataille, les deux équipes de valets ne sont pas encore revenues de la stupeur d'avoir eu à la livrer. Mais eux se doutent, à l'encontre du grand public, qui est plutôt petit, que la calamité de vivre sous un dictateur ne justifie plus seule tant d'abnégation sauvage : comme à la chute de l'Empire romain, l'avenir, l'humanité et même la liberté sont désormais du côté des barbares.


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