Posted by Briseurs de jeu on March 29, 2001 at 01:07:23 PM EST:
Le cirque est d'abord un spectacle. C'est un spectacle à l'ancienne, un amusement pour pauvres, qui concentre de manière plutôt putassière les rudiments du spectacle plus généralisé dont Debord avait fait l'allégorie de larges pans de la société. On y force l'extraordinaire pour épater des spectateurs. On s'y délecte de monstres et on y forme des monstres. On y démontre jusqu'où peut aller l'apprivoisement, dans un mélange où l'on ne distingue plus entre animaux et humains, soumis à la même routine infecte du « numéro ». Les adultes, d'ailleurs, ne sont spectateurs dupes du cirque que pour duper les enfants, qui se sont lassés au cours du siècle écoulé de cette boîte de Pandore aux rituels désuets et au mercantilisme minimisé par la pitié ahurie que les pauvres ont pour leurs amuseurs quand ils font faillite. Le cirque n'a pas résisté à tous les autres spectacles spécifiques et généraux qui sont venus se bousculer dans le partage de notre crédulité blasée. Le sport, les trucages télévisés, cinématographiques et informatiques sont allés beaucoup plus loin dans l'épate que le cirque, sur son terrain même. Sans la commisération déguisée en pseudo-admiration de la bonne pensée qui voit de l'authentique jusque dans le désuet, et qui veut éterniser tout ce qui était authentique dans le passé, le cirque aurait disparu de la planète. Sa survie artificielle a les avantages de la survie artificielle du catholicisme désarmé ou de la théorie intermédiaire de Feuerbach, toujours applaudie par tous, comme si son insuffisance se suffisait d'avoir été signalée : c'est le bon spectacle, qui peut passer pour familier et sympathique, parce qu'on sait bien qu'il est inoffensif dans ce monde. On ne met plus les vieillards sur la cime des arbres pour que ces bouches inutiles se tuent en tombant, on les shoote au formol, et on fait défiler devant leurs yeux fatigués le monde à l'envers, où ils se voient eux-même jeunes, beaux et intelligents. Ce qu'on appelle aujourd'hui l'humanité, c'est l'apologie honteuse et secrète de la vieillesse et de son négatif sous verre, n'est-ce pas Papy Voyer ?
La VOYERISATION, la falsification pour dissimuler l'impuissance théoricienne, justement, est aujourd'hui une sorte de petit cirque, en pleine faillite. La petite troupe de la voyérisation continue de tourner, de se donner en spectacle, mais il y a un an qu'elle n'a plus rien à dire. Depuis que les téléologues ont ridiculisé les prétentions théoriques de leur vedette américaine du moment, la Weltfausseté (qui avait dû remballer précipitamment sa substansu à trois kopeks et ses guénoneries sur l'infini, remettant sa grande œuvre théorique en un temps et en un lieu où elle sera moins critiquable), ce qu'on appelle une idée s'est autant éloigné du petit milieu voyérisateur dans la caricature que le cirque d'aujourd'hui s'est éloigné de celui des gladiateurs et des lions de Rome.
L'illusionniste et ses marionnettes
On voit encore se produire le patron de cette petite ménagerie, sans quoi elle se selbstdissoudrait. Il faut reconnaître, avec tristesse, que ses entrées en piste sous le nom d'artiste M. Ripley (qui s'amuse comme il se doit) se font en fauteuil roulant et que ses glaviotages sous perfusion, censés être un numéro de théorie, sont encore du numéro, mais pas de la théorie, comme on peut le vérifier facilement dans sa dernière chanson, 'Hegel, Marx, Dieu et moi' : les rares spectateurs du premier rang n'y essuient que du postillon. Les plus gros trucages qui sous-tendent ce tour ont été dévoilés.
Aidé de son fidèle ouistiti à enculer (aïe, la poésie du cirque !), le falsificateur von Nichts, que nous confondons parfois avec le falsificateur Aristoutou, qui est l'ex-faux Aristote, que nous confondons parfois avec le Faux Cavell, qui par une pitoyable pirouette parle justement de cirque en faillite, mais à propos de l'OT (depuis que nous nous sommes intéressés au petit cirque voyérisateur, ses animateurs ingrats et mal informés annoncent rituellement notre fin), notre Jean-Cule Voyer se spécialise depuis dix ans dans les numéros de prestidigitation, que l'on appellera plus prosaïquement trucages de données à tendance systématique. Il vient d'ailleurs de perfectionner encore son dernier numéro, « Le debordoff trié par noms, dates et heures », que l'on appellera plus prosaïquement « Tromper les tiers par n'importe quel moyen ». Jusqu'ici le numéro consistait à regrouper frauduleusement quelques signatures disparates dans cette liste présentée mensongèrement comme alphabétique et à censurer les seuls faux qui dérangent les membres de sa troupe en les éliminant sans le dire de celle-ci et d'une autre liste, chronologique, des mêmes messages. Devant le tolléologue, nos vieux singes rétablissent maintenant ces faux en catastrophe, en leur attribuant la signature infamante de « Faussaire » que personne n'a jamais utilisée, ce qui est donc une nouvelle falsification de ces listes. Mais ils ne se contentent pas d'accoler cette fausse signature à plusieurs textes faux, ils y mêlent un texte de l'OT, qui n'est pas un faux, pour montrer que comme ils sont incapables d'y répondre ils tentent de lui régler son compte autrement. Intitulé 'La fin de Hegel', et signé fort justement Aristote (avec mention de sa provenance téléologue à la fin du message), ce texte est désormais signé Faussaire par le fétichiste du tour de passe-passe dans ses listes à prétention objective, qui voudrait ainsi faire croire que 'La fin de Hegel' aurait pu être attribué au faux Aristote (pas OT). De plus, à partir du moment où ces listes contiennent désormais un certain nombre de textes estampillés « Faussaire », tous les messages qui ne sont pas signalés comme étant l'œuvre de faussaires sont validés par cela même et par contraste, présentés comme bons, justes, vrais. La bonne soixantaine de falsifications commises contre les téléologues, par exemple, dans lesquelles nous ne pouvons plus douter que le ouistiti et le directeur du cirque ont trempé, sont donc par magie (qu'on appellera plus prosaïquement falsification massive) présentées comme n'étant pas des faux, mais d'authentiques messages de l'observatoire de téléologie. C'est une technique courante du petit cirque : quand on est pris en train de falsifier, on accuse l'autre d'être un « Faussaire » ou un falsificateur. Comme ça, non seulement on s'exonère de répondre de ses falsifications, mais on fait diversion. Et quand les voyérisateurs sont obligés de reconnaître et de corriger une falsification comme dans leurs listes, ils commettent une nouvelle falsification, plus grosse que la précédente.
Un autre numéro de notre sémillant barbon s'intitule « La tortue renversée ». La tortue, parce qu'il ressemble à cette figure militaire romaine qui consistait à avancer cuirassé de boucliers. Voyer, après dix ans d'impuissance dissimulée derrière un mépris feint, répond maintenant aux téléologues en feignant toujours de ne pas répondre, parce que l'enculé commence à se rendre compte que son silence se retourne contre sa carrière ; c'est pourquoi il ne répond encore aux téléologues que par boucliers interposés : le bouclier de la Weltfausseté explosée étant insuffisant et difficilement extensible, voilà simultanément les boucliers insuffisants, mais extensibles, Aristoutou, l'impuissant par définition, et Jules, qui n'a encore jamais compris que les affectations dans ce qu'il a lu, heureusement pour Platon et Hegel, où il n'a donc rien trouvé. Et cette tortue est renversée, parce qu'au lieu d'avancer elle recule, normal pour un Voyer Jean-Cule ; et, justement, comme il n'a que ces trois boucliers en papier, l'un explosé sur la raie, l'autre impuissant sur les genoux, le troisième affecté sur le bide, le cul de l'artiste est nu. On y remarque la particularité suivante : l'orifice brun est plus grand que les deux vieilles fesses jaunies et parcheminées réunies. C'est-à-dire que si quiconque d'un peu honnête le fistait comme il le mérite, le poing ne toucherait pas les parois. C'est ça le cirque : un lieu où on expose les monstres.
Le bueno, l'oberbrute et le panzertruand
Le numéro suivant s'appelle « La triplette magique », mais tous les fans de dialectique lui donneront un nom moins formel, quoique plus adapté au contenu, beau comme un drame en deux actes de Shakespeare : « La déroute ».
Le premier acte se passe en juin 2000. C'est une lettre de l'équilibriste Obertopp, à 15 millimètres des pâquerettes, qui est la hauteur de pointe de cette vache à œillères. Son destinataire est le bouffon de la théorie, le dompteur de téléos Weltfaust, qui vient justement de se faire bouffer (en avril 2000) la substansu par des téléologues pas encore apprivoisés, et qui est à ce moment-là à l'infirmerie en fort piteux état. Pour introduire le troisième personnage, le clown Bueno, à peu près dans le même état que le brillant dompteur de téléos, parce qu'il s'est également retrouvé démystifié de toutes ses vantardises et a été pris en flagrant délit de mensonge, en avril 2000, il suffit de signaler que l'Obertopp lui envoie cette lettre en copie cachée (bcc), c'est-à-dire dans l'intention de dissimuler cette copie. A qui l'Obertopp veut dissimuler cette copie ? A la police ? Aux escadrons de la mort de la téléologie moderne ? A papa et maman, révolutionnaires jusqu'en 1975, année où notre Oberkalb commença à trottiner ? Non, bien sûr, elle cherche uniquement ici à tromper son destinataire, la Weltfausseté à l'infirmerie. Vive les mœurs entre voyérisateurs ! Fanfare !
La lettre de cette Oberspott est d'abord un ennuyeux numéro de récitation de debordisme mâtiné de voyérisme, mal appris, mal digérés, mal compris. Les petits cirques paraissent parfois les caricatures des grands, mais c'est parce que l'insuffisance généralisée caricature l'insuffisance particulière. Si l'on avait voulu montrer la dégénérescence ubuesque de la pensée situationniste aujourd'hui, on n'aurait rien fait de mieux que ce robot stalinositu carapacé, ressassant avec une véhémence mécanique des trivialités d'une époque révolue qu'elle n'a même pas vécue et des sottises à hurler de rire, non sans une prétention grotesque et une vraie vulgarité approximative, qui est en effet au diapason d'un Weltfaust (cette modedevitiste prétend ailleurs, avec une fausse modestie affectée, avoir montré que « la pensée stratégique » de « l'ennemi » « ne peut pas exister »). Cette morgue ridicule ne vient que du fait que les deux autres compères de cette « triplette magique » sont déjà en déroute à ce moment de l'échange, alors que la réponse qui a fait s'écraser mollement l'Obertopp, dans les pâquerettes, n'est venue que huit jours plus tard. « La déroute » est un numéro de choix parce que deux des performers l'ont subie, on les devine derrière le récit consternés et effondrés, alors que la troisième, la récitante, fanfaronne encore doctement.
On comprend pourquoi la Weltfausseté ne voulait pas que cette missive soit publique : d'abord l'alliance du dompteur dompté avec l'équilibriste qui plafonne à 15 millimètres fait plutôt grotesque pour le futur grand théoricien du XXIIe siècle, et mensonger pour quelqu'un qui avait prétendu régler ses comptes tout seul. Les téléologues avaient montré que ce lèche-cul avait courtisé n'importe qui contre les téléologues, putassant des Faux Aristote, des FC, des Terrien et donc même des Obertopp, des Bueno, méticuleux avec les miettes principalement, comme dans son exercice fétiche de manieur de concepts en chambre ; ensuite ce message, qu'il faut prendre avec des pincettes à merde puisqu'il est signé par une menteuse confondue huit jours plus tard, révèle que ce qui unit toute cette frange de la voyérisation, c'est le calcul des effets sur le public, la manipulation médiatique, la tactique dans le sens léniniste du terme, mais sans le talent du chef bolchevique. On s'y inquiète notamment de ce que l'hystérie antitéléologue, dont ce sont là quelques-uns des principaux acteurs, pourrait nuire à l'image du parti de la voyérisation. On y voit la Weltfausseté accusée de reconnaître que les téléologues tentent « de faire quelque chose dans la théorie », fort en contradiction avec les péremptoires dénigrements que ce plouc arriviste a toujours martelés en public. On y voit la Weltfausseté se lamenter sur les « insuffisances théoriques » de not' bon maît' Voyer, largement mises en valeur par l'OT et fort en contradiction avec l'affirmation Weltfausse que Voyer n'a toujours pas été critiqué. On y voit l'Obertopp paraphraser avec impatience la demande de l'OT, que la Weltfausseté déballe enfin son fameux principe du monde prêt à être consommé et dissimulé au public pour des raisons inavouables, au lieu de promettre sans fin cette critique de Voyer, en petit adolescent refoulé et mégalomane de bunker de banlieue, ou plutôt en gros vantard déballonné. On y lit cette phrase qui est un résumé de la défaite de tout le petit ramassis anti-OT, et qui montre que ces alliés ne sont pas dupes des piaillements de victoire de la Weltfausseté : « Je pense que vous avez apporté la preuve pratique de ce que je disais à propos de l'impossibilité de critiquer les militants de l'OT dans le conditions où vous prétendez l'avoir fait. » On y découvre les doutes privés des conservateurs jouant l'assurance totale en public : « Effectivement, ils incitent à la réflexion: je me suis posée maintes fois la même question que vous, est-ce possible que je sois moi-même aveuglée à ce point? » Tout ce en quoi ils croient, bon petit peuple postsitu, serait-il faux, religion, triche, foutaises, insuffisance comme l'affirme l'OT ? Non, le fait d'avoir pensé qu'ils ont pu se tromper suffit à ces gens-là comme preuve du contraire : « Mais, heureusement pour moi, ils ne sont même pas subtiles dans leurs machinations, ce qui me rend l'assurance de, au moins dans leur cas, ne pas être dans l'erreur. » On y voit suggéré par la conne ce qui allait devenir la base de la seconde série d'inepties délirantes proférées par la Weltfausseté quatre mois plus tard, après une longue convalescence : « En bref, essayer de prouver qu'il n'y a pas eu de falsification, sans parler de qui aurait falsifié qui, c'est jouer le jeu des calomniateurs. » Au cirque de la voyérisation, les dompteurs à la substansu percée peuvent toujours se recycler dans le jonglage : il y a eu falsification ; si ce n'est pas Voyer qui est falsificateur, axiome intangible, c'est donc ceux qui l'accusent ! Mais c'est bien sûr, comment n'y avais-je pas pensé avant, mon cher élémentaire ! C'est à ces sophismes gamins que les voyérisateurs ont confié leur cohérence pendant les deux petits mois qu'il a fallus pour torcher à nouveau la Weltfausseté quittant la piste en costume d'Iznogoud un peu déchiré. Vive les mœurs et les raisonnements des voyérisateurs ! Fanfare !
Tout ce monologue acre et dépité de l'équilibriste à 15 millimètres est évidemment un numéro à la gloire de ce mythique OT, qui n'a rien demandé à des gens aussi démunis. Tout, dans cette fantasmagorie romancée de l'OT, est « machination », et l'OT devient même un « genre de brigata rossa de la théorie ». Que faut-il faire avec de pareils théoristes qui ne respectent plus les pensées sacrées du passé, du cirque à sa grande époque ? « On ne critique pas théoriquement des idéologues, on les anéantit dans la pratique (…). » La déroute est ici l'envers d'une vision du monde détruite, où l'on rêve encore de démontrer la vérité « dans la pratique quotidienne de la révolte », comme si la pratique de la révolte pouvait être quotidienne, mais qui refuse encore d'admettre cette destruction. Toutes ces intentions, qui ne sont que des délires de voyérisateurs prêtés aux téléologues, tous ces trucages, ces manigances pitoyables, ces remontages de bretelle, ne servent qu'à combler la faille que l'OT a révélée. Car de deux choses l'une, soit ils se sont trompés sur tout, soit il faut qu'ils affirment que les téléologues se sont trompés sur tout. Cette lettre n'est donc pas exemplaire essentiellement par les petits potins qui révèlent des alliés aussi fourbes et aussi mal en point ; mais par la tragédie dans laquelle l'OT a plongé ces affabulateurs catastrophés de la basse middle class, par leur fascination incrédule, par leur haine sans commune mesure avec le « kolossal » rien de la téléologie moderne. Et comme toujours, en désespoir de cause chez ce petit peuple racorni, maladif d'autosuffisance dans un monde où ils sont peanuts, c'est la version policière qui finit par tout justifier ; car s'il est bien une imputation contre laquelle on ne peut pas réunir de preuves, c'est d'être un espion. « C'est des ennemis à abattre, d'autant plus importants qu'ils sont infiltrés dans nos rangs. » La calomnie réitérée d'« espions ennemis » a l'avantage d'éviter l'argumentation : on n'argumente pas avec les espions, et c'est la meilleure façon de se blinder contre des idées qu'on ne peut plus affronter.
L'acte deux du numéro, c'est le clown Bueno qui publie ce message neuf mois plus tard, en mars 2001, contre l'avis exprès de la Weltfausseté et probablement de son Oberpote, comme l'indique la note de présentation : « Cette lettre nous a été envoyée en bcc par KO. Nous nous excusons auprès de l'excellent Doktor et de la blonde la plus blonde au sud du Rhin pour l'avoir publiée sans demander leur permission, mais que faire? Ils auraient pu dire non. »
Comment ne pas rire d'une pareille bouffonnerie ? Quand on voit que cette lettre n'est qu'un tissu de sournoises imbécillités, de tractations et de manœuvres politiciennes d'alliés sans franchise, faibles et médiocres, qui ne cherchent plus qu'à sauver la face, unis par la haine impuissante d'une théorie qui menace effectivement de détruire tout ce qu'ils sont dans leur petite religiosité quotidienne, comment le clown Bueno ne peut-il pas comprendre pourquoi ses deux compères non seulement auraient pu dire non, mais vont hurler non, non, non ?
C'est qu'il n'y avait rien d'autre à mettre sur son site désespérément vide, et qu'il fallait meubler. Le clown si fier de son habit de lumière (le look de son site) l'a fait à la manière de la presse à scandale, faut bien attirer les petits nenfants : un « Texte inédit de Kathrin Obertopp », dans la série des « Oeuvres choisies de la môme Kathrin », comme le titrait avec un paternalisme répugnant ce grand ennemi des néo-étudiants et autres fils à papa. Vive les mœurs, les raisonnements et les calculs des voyérisateurs ! Fanfare !
Aujourd'hui, le site de cette pittoresque crapule est déjà fermé : le numéro n'a même pas duré quinze jours. Nous rions rien qu'à penser aux engueulades, aux tactiques et aux pressions qu'a dû utiliser la petite coterie pour forcer le bouffon imbécile et imbu à l'autocensure. Dommage que le numéro « Quand le situ dépotoir devient panier de crabes » ne soit encore qu'en répétition. En attendant que ce nouveau burlesque soit à l'affiche de la piste aux étoiles, tous ceux qui nous en feront la demande pourront obtenir le script de « La triplette magique » de nos trois foiriens.
L'école des singes
Passons un moment à applaudir les numéros subalternes et de transition, parce qu'ils sont devenus l'essentiel du cirque de la voyérisation, son véritable contenu. Encore une fois, nous allons décevoir les spectateurs, parce que lorsque le jeu perd son sens, comme dans le voyérisme en particulier et le postsituationnisme en général, la plupart des pauvres vaincus, comme les acteurs de ce cirque, se tournent vers la triche pour donner une extension factice à ce qui ne marche plus ; nous préférons être des briseurs de jeu, qui démontent les mécanismes de cette forme de conservatisme, que les complices bienveillants de ces tricheries qui aimeraient se faire passer pour des « rigolades », et quoique nous nous sentions parfaitement capables de battre ces sautilleurs maladroits sur leurs trapèzes, c'est un terrain où nous n'irons pas. Ce qui est vraiment drôle est toujours ce qui est le plus près de ce qui est vraiment sérieux.
C'est justement de vrai sérieux que les voyérisateurs sont si désespérément incapables. Le numéro des ouistitis savants, par exemple, est entièrement l'héritier du numéro de l'entubé Karl von Nichts. Ces Faux Aristote, Jules G, Weber, YBM (parmi lesquels se cachent le bredouillant nigaud Faux Cavell et, probablement, le terrifiant nigaud Keyser Soze) sont comme le faux Aristote et le vrai Nichts, totalement vides de fond. Ils cultivent la forme, comme on dit dans les salles de gym. Ils ne sont que dans l'effet, dans la pirouette, et quand ils se cassent la figure, ces ouistitis dressés à la logique formelle changent simplement de bonnet, et on croit qu'ils sont tout neufs, que le cirque a acquis un nouveau petit singe. Mais ils n'ont rigoureusement rien à dire et chaque fois qu'ils prétendent parler d'une question de fond, il s'avère qu'ils n'ont même pas compris ce dont il s'agit (Faux Cavell, Weber, Jules G sont particulièrement transparents là-dessus). Cette fournée de poseurs-littérateurs du troisième rayon a été la première vague antitéléologique à laquelle nous avons renoncé à répondre. Tout simplement parce que ces petits macaques et entelles ont tellement peu de fond, tellement peu de haine contre ce monde qu'ils sont tout juste bons à ferrailler contre quelques médiocres wannabe littéraires ou médiatiques pour défendre la bonne parole du bon maît' Voyer, qui, de moins en moins regardant sur la qualité de son spectacle, a fait de ces ouistitis et semnopithèques sa garde vonnichtsienne. Ce sont là des nuisances, de la piétaille de parti, comme il en abonde dans toutes les coteries conservatrices, et qui infestent certaines villes d'Inde, où ils sont sacrés.
La philosophie d'entreprise de ce petit gang est le fun. Il faut rigoler vite et court, comme à l'école. Ces petits singes applaudissent des quatre mains Jean-Cule Voyer, leur bon maître, non pour sa théorie, qu'ils répètent seulement sans même envisager de la critiquer, mais pour sa posture ; et non pas pour sa posture d'ennemi de ce monde, mais pour sa posture de prestidigitateur dans la littérature, de persifleur de Lévy, Debord, Bourriaud, qui sont la bonne parole dominante. Là où ils peuvent épater le degauche avec l'anti-antisémitisme et l'économie qui n'existe pas, ils prennent la pose du négatif, ils font des grimaces vertueuses ; ici où ces banalités sont connues et déjà réfutées, ils soutiennent l'idélologie de la résignation. Là ils passent pour les pourfendeurs de ce dont ils se font ici les défendeurs : un conservatisme qui se maintient par la triche. Jean-Cule Voyer au contraire fait l'abonné absent, le décalé, le supérieur, qui ne se mouille pas. Imitateurs comme tous les singes, nos petits voyérisateurs de l'entracte font les insolents, les supérieurs, et insultent les spectateurs, tentent de les empêcher de parler, et leur jettent leurs écorces de cacahuètes vides en prenant des poses de bretteurs de l'époque de Louis XIII. Pour mettre en place leurs gloussements simiesques, deux techniques émergent. D'abord, le culte du titre : on a bien compris que sur un forum ce qui frappe le plus grand nombre ou le nouveau venu, c'est le titre. Pour défendre la pose de Jean-Cule Voyer, il vaut mieux cent titres avec une ligne de texte que cent lignes de texte avec un titre. Ce n'est pas l'information dominante qui viendra contredire ce procédé du jet court tape-à-l'œil, caractéristique des potaches, des frimeurs, des ouistitis apprivoisés et du tabloïd. C'est en même temps une façon commode de dissimuler qu'on n'a rien à dire. La fonction du ouistiti est de faire écran, d'attaquer sur la forme, de faire de la galipette et un peu de tapage strident, chaparder ou chier un petit truc. C'est aussi une tentative de revaloriser par contraste un fond, inaccessible pour ces exécutants, de l'immense écrivain caché derrière. Mais, à travers ce goût immodéré et réciproque des ouistitis et de Voyer, nous commençons à percer le grand secret de sa vie et de sa théorie : Jean-Cule Voyer lui-même n'est probablement qu'un petit singe apprivoisé par Debord. Il a pris Guy-Ernest pour Hanuman, et il rêve d'être Hanuman à son tour. Et voilà donc une perspective de carrière de strass et de numéros du cirque de l'an 2010 qui se profile pour ce petit peuple malingre, fébrile et poseur.
L'autre technique est très ancienne aussi, mais a été systématisée par FC, le Faux Cul qui feint de s'offusquer qu'on puisse traiter un antivoyériste de voyérisateur. Comme ce truqueur-là n'a jamais réussi à se hausser jusqu'aux questions sérieuses, non sans avoir piteusement échoué (pour mémoire, c'est lui qui concluait : « Vive l'existence, à bas la réalité ! »), il a pris le parti de rabaisser à son niveau ce qui passe au-dessus de son museau. Ainsi par exemple, la critique de Voyer est détournée en un pinaillage pour savoir si Voyer est antisémite. Cette technique de dévaluation du contenu par ceux qui sont incapables de se l'approprier avait été pratiquée à une grande échelle par le faux Aristote à l'égard de l'OT. C'est aujourd'hui la figure qui rapporte le plus de cacahuètes aux ouistitis, qui les fait le plus piailler. Et comme même sur ce terrain l'impuissance remplace vite l'imagination, les haha, blabla, glouglou, macaroni viennent résumer ce que de Voyer à Ben Aziz, en passant par Jules et Gym, on est en mesure d'opposer aux téléologues.
Les numéros de singe font souvent rire le public superficiel, parce qu'ils sont une caricature de l'humain infantilisé, du potache. Insolence, trucage et barbotage, petits cris stridents sont les ingrédients de cette excellent cocktail pour pauvres fatigués du milieu du siècle dernier. Les faussaires qui signent des messages vides « Le téléologue farceur » ou « Le téléologue grognon » puis, pour augmenter la provocation, « Le téléologue journaliste » pratiquent un numéro assez proche des précédents, et on peut dire sans grande crainte de se tromper que ce sont là aussi des ouistitis. L'idée est d'explorer la falsification le plus près possible de la « rigolade » en fouillant dans le no-men's land entre la malhonnêteté caractérisée et le fauxculisme déguisé en potacherie d'adultes qui font une fixette. Ces aveux complets d'impuissance sur le fond et de fascination pour l'OT sont des performances tellement désuètes (nous avons essayé d'imaginer qui ils pourraient faire rire, et ça c'est drôle !) que nous préférons les laisser comme tels. Mais à la réflexion, ces petites crapuleries en bordure de la falsification tentent en fait de valider les falsifications massives antérieures : si leurs auteurs arrivent à prouver que le téléologue bordelais, voire le téléologue journaliste c'est pas grave, on a bien le droit de signer comme on veut, alors qu'est-ce qui les différencie, au fond, de la signature OT utilisée par les mêmes truqueurs ? Voilà la vraie faillite du petit cirque : constamment en train de justifier sa crapulerie par l'inanité et son inanité par la crapulerie.