Posted by Domaine Public on November 25, 2000 at 09:59:57 AM EST:
TIQQUN n° 1
118, rue Mouffetard,
75005, Paris
Comité de
rédaction : Julien Boudart, Fulvia Carnevale, Julien Coupat, Junuis Frey,
Joël Gayraud, Stephan Hottner, Remy Ricordeau
Extraits de
l’article : De l’économie considérée comme magie noire
Une remarque, en passant, sur le
bouffon-dialecticien Voyer. Nous lui prenons son concept de Publicité, il ne
méritait pas de le garder, d’autant qu’il n’a rien su en faire depuis l’Introduction
à la science de la publicité, qui était encore un assez bon livre. Mais on
y devinait déjà ce vice insupportable : Voyer nourrit une haine
instinctive pour le SILENCE. Aussi
a-t-il voulu croire que la Publicité, définitivement, absolument, était fondée
en elle-même, ce qui est évidemment faux (de même, les concepts d’individu
et de genre ont ce défaut inexcusable de cacher par une immanence
satisfaite l’incomplétude de l’homme ; là encore il y a un reste,
et ce reste, c’est le Bloom). On comprend alors que ce concept, censé flotter
sur les plus hautes cimes de l’Esprit, ait pu accoucher de cette souris
anorexique et positive qu’est la « communication » ou d’une utopie
aussi crétine et repoussante que le bavardage. Toutes les contorsions et
toutes les grimaces de Voyer ne suffisent pas à cacher ce fait qu’il a lui
aussi « oublié » de considérer le négatif là où on l’avait
enterré… Comment ce pseudo-trobriandais de la contestation pourrait-il
comprendre que l’opposition de la Publicité et du Spectacle est dépassée et, en
dernière analyse, médiée activement, par le Silence (certes le Spectacle est
une aliénation de la Publicité, et donc la Publicité qui se nie elle-même, mais
le Silence ou l’Invisible est la négation de cette négation) ; que la
négation du spectacle est non seulement négation de la dictature dans la
visibilité, mais aussi de la dictature de la visibilité ; que les
destructeurs silencieux de Turin [allusion au « défilé silencieux
et hostile de plusieurs centaines d’anarchistes » en mars 1998 à la
suite de la mort en prison d’un des leurs (Cf. Le silence et son au-delà,
p. 72)] ont épousé la forme redoutable d’une telle négation, et que c’est en
cela même qu’ils sont destructeurs ! Aussi par passion de la visibilité la
pauvre girouette Voyer a rendu invisible la contestation ; et elle peut
bien tourner, bondir, hurler qu’on la regarde faire ses lamentables pitreries
épistolaires ou autres, nous la laissons là, à l’indifférence et aux scorpions.
(p. 83, 84)
Le phénomène comme phénomène est
le supra-sensible, l’apparaître lui-même n’apparaît pas. La Métaphysique
Critique peut révéler que l’apparaître est et que cela constitue
un mystère. Elle peut aussi montrer comment ce mystère se manifeste à l’époque
du Spectacle : il se manifeste comme ne se manifestant pas en tant que
mystère. Mais la Métaphysique Critique ne peut ni ne veut détruire ce
mystère. Nous laissons au Spectacle ce sisyphien entêtement à une tâche
absurde. Plus précisément : l’existence de ce mystère peut être
rendue publique, contrairement au mystère lui-même, qui est commun, mais qui ne
saurait évidemment être lui-même publique. Ici intervient la différence entre
Publicité et Commun (que Voyer a lubriquement confondus, pour la gloire de
Publicis et de Euro-RSCG). Le Commun est ce qui nous est donné en partage, la
Publicité est la pratique consciente de ce partage, qui sait donc ce
qu’elle doit au Commun : qu’elle en est l’aliénation nécessaire.
(p. 90, 91)