Posted by Marcel Platon on July 09, 2000 at 12:09:29 PM EDT:
In Reply to: La réalité est un résultat posted by on July 08, 2000 at 04:33:05 PM EDT:
"Une maison, un livre, une victoire, une vie ne sont une réalité que lorsqu'ils sont
achevés"
Ca veut dire qu'un homme qui n'achève pas sa victoire, sa vie ou son livre, n'aurait
pas droit au même quota de réalité qu'un autre?
Un crayonnage est il toujours moins réel que la croute surchargée dont il peut n'être
que la seule esquisse et donc en représenter l'inachèvement?
Un enfant qui ne grandit pas, un handicapé qui n'achève pas le potentiel des facultés
mentales dites normales est-il pour autant moins homme ou moins réel qu'un autre?
Vous connaissez la "Cavalinité" de Platon, ce tout premier phénoménologue qui nous
a fort joliment laissé entendre que l'idée du cheval est un pré-requis pour que l'on
puisse déterminer dans la diversité des objets qui nous entourent ceux que l'on peut
dès lors nommer "cheval". Platon était un peu comme vous obsédé par la notion de
complétude: un cheval non achevé est il toujours un cheval? Même s'il lui manque la
crinière? les pattes? et la tête? (alouette)
Platon n'a pas eu besoin de créer une "Encyclopédie des chevaux" ou une "Bibliothèque
de la cavalinité" pour répertorier l'ensemble des descriptions de chevaux de par le
monde car il a compris que toute les descriptions de choses, de chevaux ou d'émeutes,
fussent elles extrèmement rigoureuses seront toujours dans le cadre définitionnel plus
restrictives que l'idée même de cheval, même vague et commune, qui transcende et
synthétise à priori toute description.
La description empirique ne peut achever, épuiser le réel. Or si elle ne peut à elle
seule dévoiler la réalité, elle peut en revanche aider à éclaicir, voire à réfuter les
idées que l'on se fait sur ce dit réel, mais ceci indépendamment du fait que ce réel
soit constitué de choses dites achevées ou pas.
Ainsi toute historiographie n'est réelle qu'en fonction de l'idée que l'on se fait de
l'histoire. De même toute ethnographie en tant que corpus, c'est à dire en tant
qu'ensemble de données achevées, n'a aucun sens et donc aucune réalité pour nous sans
l'assistance des modèles (même controversés) et de l'idée même d'ethnologie.
Je suis d'accord avec vous pour dire que "la Réalité est un résultat", mais c'est le
résultat mouvant de notre propre pensée, la seule réalité étant pour nous un ensemble
d'idées que l'on appelle phénomènes (le cheval devant moi est un phénomène car je le
perçois comme cheval grace à l'idée qui me sert à définir un cheval par rapport à un
non-cheval)
Je suis donc évidemment d'accord avec vous pour dire que la réalité n'est pas un donné
puisqu'elle est un ensemble d'idées construite par la pensée et que nous posons sur
les choses. En revanche il serait présomptieux de prétendre qu'il n'existe pas de
substrat nouménal à cette pensée, mais cette supposée réalité nouménale ne nous
concernerait que si elle était un tant soit peu à notre portée ce qui est le cas selon
Voyer par exemple, mais pas du tout selon Kant.
Voyer prétend que l'économie n'existe pas, qu'elle n'est pas réelle c'est à dire
qu'elle ne serait pas une idée NECESSAIRE à ce que l'on défini et que l'on vit comme
réel, point de vue que je trouve personnellement très intéressant.
Inversement L'humanité existe, elle est déjà une réalité que cela vous plaise ou non,
car elle semble être une idée nécessaire à la cohérence de ce que l'on défini et que
l'on vit comme réel, indépendamment de cette idée incompréhensible d'achèvement que
vous promulguez.
Et oui, car contrairement à l'économie, l'humanité vit, et elle peut très bien
continuer à le faire sans vous.
Oberkant Voyerkataliseur Marcel