Lettre de René Riesel envoyée à José Bové après sa libération


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Posted by FC on April 11, 2000 at 12:24:20 PM EDT:

Le 2 novembre 1999,

José,

Tu m'as téléphoné samedi dernier, pour la troisième fois depuis ta sortie de prison. Je n'avais, tu t'en doutais bien, littéralement plus rien à te dire. Pour ta part, tu saisissais à nouveau un prétexte des plus ténus (j'avais en effet eu le téléphone coupé pendant une dizaine de jours ; je n'étais pas allé à une réunion mouton à Clermont Ferrand ; bref on se demandait ce que je devenais) pour m'appeler.

Nous avons donc échangé quelques mots sans intérêt. Tout cela finissant par être assez pesant, je me suis allé à lâcher que, non, je ne participerai pas à la pantalonnade de Seattle et que tu avais dit tout et le contraire de tout depuis quelques semaines, camarade.

Cela t'a mené à constater qu'il serait peut-être utile que nous parlions et, pourquoi pas, en prenant le petit déjeuner, descente de train, à Paris. Un tel détour est inutile.

Nous avons travaillé pendant quelques trimestres en bonne intelligence autour de la question du génie génétique. Nos divergences d'approche étaient évidentes mais nous étions parvenus, dans l'élargissement de l'action entreprise et l'approfondissement de son sens, à donner à chacune d'elle l'espace dont elle avait besoin. Il nous est même arrivé d'en parler assez ouvertement.

Notre dernier contact avant ces trois communications téléphoniques s'était fait par personne interposée. A la lettre que je t'avais fait parvenir en prison très peu de jours avant ta mise en liberté, tu m'avais fait répondre que tu étais d'accord.

Si l'analyse rapide que je t'y proposais était succinte, elle était juste, ce que la suite n'a cessé de démontrer. Tu as choisi de fermer les fragiles perspectives qui s'ouvraient en te livrant à la fréquentation ostentatoire des plus inqualifiables canailles, au bouche à bouche sur le premier social-traître venu, aux plus honteuses alliances, aux plus pitoyables pitreries consensuelles. Tu as su faire mieux, par tes propres moyens, que ce contre quoi je te mettais en garde.

N'imagine pas que cette divergence là, une de trop, puisse être qualifiée de tactique. Nous n'avons pas les mêmes méthodes et pas les mêmes fréquentations parce que nous n'avons pas les mêmes buts, c'est tout.

Sais-tu ce qu'on dit dans les banlieues, parmi les jeunes pauvres que tes amis citoyens rêvent d'inclure dans leur monde de merde et leur commerce équitable ? «Bové, il a paumé sa jupe !» Ce qui signifie à peu près : «il marche à côté de ses pompes». Voilà un jugement plus sûr que celui de n'importe quel tribunal international.

Il faudra bien qu'il soit rendu public.

René Riesel



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