Posted by ben aziz on January 22, 2000 at 06:21:16 AM EST:
In Reply to: à propos de Artichauts de Bruxelles, d'Yves Le Manach posted by F.D.S.M. on January 22, 2000 at 05:43:59 AM EST:
: Les artichauts de M. Le Manach
: (à propos de Artichauts de Bruxelles, d'Yves Le Manach)
:
: Au risque de prendre le contre-pied d'une habitude bien établie de la critique, je m'empresse d'écrire, avant toute chose, que je ne salue pas cette nouvelle publication de L'Insomniaque, dans la collection A couteaux tirés. Ce morceau de littérature anti-debordienne est une nouvelle manifestation (après, par exemple le retors Libertaires et "ultra-gauche" contre le négationnisme, publié par les soins des éditions Reflex ) de l'hostilité de cette mouvance ultra-gauche contre les situationnistes en général et Debord en particulier.
: Après avoir rappelé que c'est en partie à Debord qu'il doit d'avoir publié son premier livre aux éditions Champ libre, et tout en nous affirmant qu'il ne veut "retenir que ce qu'il y a de bon dans la vie d'un homme", Le Manach écrit pis que pendre de Debord. En voilà encore un qui reproche simultanément à Debord d'avoir été une autorité, à la tête d'un Comité central de l'I.S. (exhumant les antiques garnautins pour l'occasion) et de n'avoir pas été "à la tête d'une véritable armée de dissolution des moeurs" après 1968. Notons au passage que l'I.S., dans le cerveau troublé de Le Manach semble n'avoir été rien de plus qu'une variante radicale des mouvements de libération sexuelle qui fleurirent après mai 68. A cette époque, écrit sommairement Le Manach de Debord, "le temps des combats était pour lui révolu". C'est ainsi que pour finir l'on est seulement l'avant-dernier des situationnistes -ce qui nous laisse le soin de découvrir le dernier: Le Manach lui-même? Mais est-ce si simple? Le public est invité à se reporter là-dessus à Correspondance avec Guy Debord.
: De toute façon, aux yeux de Le Manach, toute l'activité de Debord après, grosso modo, la dissolution de l'I.S., se ramena à ceci: "Au long des années 70, Debord, sous prétexte de lutter contre sa droite pro-situ, élimina en réalité sa gauche." De quels individus se composait cette gauche, voilà ce que ne nous dit pas Le Manach. Pense-t-il à Voyer, qu'il évoque quelques lignes plus loin? On voit ce qu'il en est de ce Voyer par sa dernière oeuvrette publiée par Trédaniel, bien connu pour être à la gauche d'un Debord. Il est piquant d'apprendre que Le Manach jugea bon de rompre au début des années 80 avec Champ Libre, "donc aussi avec Debord", quand Lebovici "congédia Voyer" (à la suite du lamentable épisode des lettres de Voyer à Lebovici). Cela faisait tout de même plus de 7 ans que Le Manach, de son propre aveu, avait rencontré Debord pour la dernière fois. Son seul livre publié aux éditions Champ Libre l'avait été en 1973. Là encore, sachant comme Bye bye turbin avait ébloui le monde à sa parution, on imagine bien la blessure que cette rupture théâtrale a dû représenter pour Champ Libre -"au début des années 80". Et Voyer, quel beau prétexte ce fut là!
: Le Manach en savait long sur Debord. Mais nous n'en saurons rien. Ce "secret de Debord" qu'il allait rendre public quand, justement, Debord eut la malencontreuse idée de se suicider, ce secret donc est aujourd'hui parti en fumée... Nous n'en sommes pas dignes, n'ayant pas su le découvrir. C'est plus dommage encore, je crois, pour Le Manach qui en attendait "un modeste prestige" dont "il se trouve maintenant frustré". C'est dommage encore, paraît-il, pour Debord: "Si Debord avait su, avant de se suicider, que j'avait découvert ce secret, peut-être aurait-il quitté ce monde avec moins d'amertume". Il faut reconnaître que ce Le Manach possède sur les autres détracteurs de Debord l'incontestable avantage de nous livrer, sans tourner plus longtemps autour du pot, ses mobiles: "je voulais le toucher, peut-être même lui faire mal", bien qu'il soit en peine de faire "la part de la gratuité et de la justification réelle." Creusez, je vous prie, ce dernier point.
: Il est à remarquer que Le Manach a voulu, en quelque sorte, dans ses Artichauts, faire son "Portrait du cabotin en Debord". Il va jeter les cendres de son fameux secret "dans les eaux du canal de Willebroek", à la manière des lettristes jettant l'acte de fondation de l'Internationale lettriste dans le canal d'Aubervilliers. Ailleurs Le Manach s'essaie lui aussi à son panégyrique: "Je ne suis pas devenu situationniste, j'y suis né. Ce qui me donne une autorité assez difficilement contestable." Comme le peuple élu des concierges de la Contrescarpe, je présume.
: D'ailleurs, ces situationnistes, qui étaient-ils? des bourgeois, en somme, puisqu'ils "n'appartenaient pas à cette catégorie de gens qui fréquentent le dix-huitième arrondissement ou Courbevoie", à la différence de l'ajusteur Le Manach, l'incontestable situationniste.
: On ne sait trop, au demeurant, pourquoi (mais là, déjà bien avancé dans ma lecture de ces artichauts choisis dont j'ai cherché à vous rendre tout le décousu, je prends le parti de tirer le vin jusqu'à la lie) Le Manach tient à nous donner son avis sur la théorie du spectacle, lui qui, désabusé, en vient à se demander: "quel est l'intérêt des théories?" Et a fortiori cette "théorie du spectacle", tellement en deçà du questionnement voyériste ("la seule question pertinente reste celle de Voyer"). Le naïf paraît croire que les théories suffisent à changer le monde, quand elles sont justes. Si toute fois, le lecteur, en dépit des mises en garde de l'incontestable Le Manach, tient à lire Debord, qu'il se contente des "deux écrits de Debord qui méritent de passer à la postérité", à savoir Sur le passage de quelques personnes à travers une assez courte unité de temps et Critique de la séparation. Quant aux malheureux qui auront lu La société du spectacle le mal est fait, Le Manach ne peut plus rien pour eux.
: L'artichaut concernant "Guy et Gérard" (vous savez, Debord et Lebovici) est vénéneux. C'est là, pour un artichaut, une singularité remarquable, et c'est son principal intérêt. Notons cependant que Le Manach a finement compris que l'opuscule Des contrats n'apporte rien "à la théorie debordienne du spectacle" ("Au contraire!"). Le Manach croit savoir que l'aventure champ-libriste de Debord lui "a coûté très cher". S'il était besoin de le prouver "aujourd'hui pas un seul lycéen n'oserait se revendiquer de lui." Il est vrai que les lycéens paraissent chercher leur inspiration ailleurs... Bien que la poésie présente dans l'I.S., conformément au souhait formulé par Lautréamont, puisse être, écrivaient les situationnistes, lue par une adolescente de 14 ans. Les lycéens savent bien, à l'instar de Le Manach que Debord s'est bien moqué "sur le dos d'un assassiné". Bêtise? Malveillance? Faites vos jeux, ou bien tirez avec moi le rideau.
: J'allais oublier. Le Manach, après nous avoir confié à demi ses secrets conclut: "cette dramatisation artificielle de la critique, reposant sur de pseudo-secrets, a réhabilité le gauchisme." Je crois savoir, moi, quel est le secret du Manach, et je vais vous le livrer, prophylaxie oblige: consommation abusive d'argile ventilée et de boldoflorine.
: F.D.S.M.
Monsieur F.D.S.M
vous dites qu'un livre de J.P.Voyer est édité par les soins de Guy Trédaniel,de quel livre il s'agit ?
Monsieur Guy Trédaniel, est un membre assidu des cercles Lepenistes.