Posted by observatoire de téléologie on August 11, 1999 at 04:31:05 PM EDT:
"1. Même si l'unité du concept de téléologie ne peut pas être mise en doute, il en existe deux acceptions distinctes : la téléologie classique et la téléologie moderne.
La téléologie est, comme son nom l'indique, la logique de la finalité. En d'autres termes, c'est la logique qui stipule que toute chose a une fin. Dans la philosophie spéculative classique, cette fin, sous forme de cause finale, est au-delà du connaissable, en Dieu. La téléologie y est pratiquement le point de convergence des choses dont la fin n'est pas connue.
Dans la téléologie moderne, Dieu n'existe qu'en tant que concept passé, et la téléologie elle-même n'est convergence des choses qui finissent que dans l'activité humaine. Tout finir signifie tout achever, tout réaliser. Comme l'observatoire de téléologie commence à le montrer, notre monde est construit sur la croyance tenace en l'infini. Pourtant l'infini est par définition ce qui est invérifiable. La défense de l'infini, cette chimère, construction abstraite et sans fondement de l'esprit, au même titre que Dieu, est évidemment l'essence même du conservatisme. Tant que la pensée dominante prône l'infini, veut nous faire croire que l'infini est une réalité ou même une possibilité, le monde ne finira pas, sauf catastrophe.
Nous ne pouvons pas dire pour l'instant que tout finira, quoique l'inverse n'ait pas de sens ; mais nous pouvons dire : il nous appartient de tout finir, nous voulons tout finir, et notre projet est de tout achever. Tout finir dépend donc d'un débat entre humains. Nous pensons que le débat de l'humanité n'a pas d'autre sens - après en avoir fini avec les conservateurs qui voudraient que l'infini conserve ce monde - que de déterminer comment finir l'humanité, selon son concept. Car même si l'on pouvait être sûr que tout a une fin (que la chimère de l'infini ne soit plus la base pratique de notre société), il y aurait encore deux fins possibles : la catastrophe, qui est antitéléologique parce qu'elle ne réalise pas l'humanité, mais l'anéantit, et que les conservateurs utilisent comme épouvantail ; et la réalisation du genre humain, c'est-à-dire son achèvement, sa vérité. C'est de poser cette dernière éventualité comme but et projet que l'observatoire de téléologie a entrepris, comme vous pouvez le vérifier sur notre site : http://www.teleologie.org
2. Nous ne connaissons pas encore de falsification de la téléologie (nous n'imaginons pas très bien ce que cela pourrait être). Jean-Pierre Voyer a seulement falsifié une correspondance avec un téléologue moderne, Adreba Solneman, et c'était d'ailleurs à l'occasion de la première prise de position connue en faveur d'une finalité maîtrisée et aboutie. C'était donc le premier contact public d'une thèse téléologique non classique avec la pensée spéculative classique. Jean-Pierre Voyer a été le plus éminent théoricien après la fin de l'Internationale situationniste. Il a été le seul à commencer une critique des insuffisances de la pensée situationniste, et en particulier de Debord. Il a utilisé une méthode originale : réhabilitant Hegel, en bon exégète, il s'en est servi pour critiquer Marx. Il a, de cette manière, montré comment l'économie n'avait aucune réalité, contrairement à la croyance officielle. Et il a montré comment Debord était encore économiste, et comment les incohérences de Marx étaient profondément ancrées dans notre époque.
Debord, très embarrassé par la critique de Voyer, a feint de l'ignorer, sans doute aussi parce que, trop vieux et trop usé, il ne pouvait déjà plus y faire face autrement qu'en espérant faire croire au mépris. En 1978, l'éditeur et ami de Debord, Lebovici, a publié sa correspondance avec Voyer. Il y a seulement volontairement omis toutes les lettres critiques de Voyer, gommant ainsi, comme Debord, tout le débat, capital alors, que Voyer initiait. Voyer cria à la falsification dans 'Fin du situationnisme paisible', et il avait raison.
3. En 1991, Adreba Solneman a interpellé Voyer au sujet d'un article que celui-ci venait de publier dans 'l'Imbécile de Paris'. Voyer publia sur ce même support cette interpellation et sa réponse. Mais il se garda bien de publier la seconde réponse d'Adreba Solneman, qui était déjà, en germe, la critique téléologique de l'ensemble de la théorie de Voyer, sans doute parce qu'il était devenu trop vieux et trop usé, critique à laquelle il n'a jamais été capable de répondre depuis autrement qu'en espérant faire croire au mépris. En 1996, appuyé sur un éditeur visiblement à sa botte, Voyer fit publier un petit ouvrage à sa gloire intitulé 'l'Imbécile de Paris'. Comme dans la revue du même nom quelques années plus tôt, on ne trouve dans l'ouvrage que la partie de la correspondance où Voyer n'est pas critiqué, et de manière à paraître avoir le dernier mot. Ainsi, Voyer, après avoir été incapable de répondre à Adreba Solneman, agit avec ce dernier exactement comme Debord avec lui : en falsificateur. Le détail de cette malhonnêteté caractéristique de théoricien qui refuse la responsabilité de sa propre théorie peut donc se lire dans 'Fin du voyérisme paisible', publié sur l'observatoire. Ce qu'il y a de plus comique, en effet, dans cette maladie de la sénilité, est la similitude minutieuse entre les deux falsifications, à dix-huit ans d'intervalle.
Désormais, le vieux conservateur Voyer, que nous n'avons pas le pouvoir d'excommunier, se fait insulter par d'autres que nous quand il l'ouvre. Et ce n'est pas fini.
Paris, 11 août 1999."