Posted by Randal on March 15, 1999 at 02:39:34 AM EST:
Réponse à M. Viredaz
http://www.liberation.fr/forums/sokal/rr71.html
Comme vous pourrez le constater dans ces extraits, la métaphore mathématique chez Musil est peu éclairante. (De même quand il emploie une métaphore biologique "A la manière de certaines espèces de bactéries qui divisent en deux la substance organique qu'elles attaquent, l'espèce humaine, en vivant, divise l'état premier de la comparaison en deux; d'une part la matière solide de la réalité et de la vérité, d'autre part la matière vitreuse du pressentiment, de la foi et des artifices." I-696. Cette métaphore est peu éclairante mais elle produit cependant un léger effet d'épouvante et de menace comme on en trouve chez Lautréamont et chez Lovecraft). Il est possible que cela résulte d'une caractéristique propre à la métaphore mathématique. Généralement, ce sont les mathématiciens et les physiciens qui recourent à des métaphores pour se faire comprendre des non spécialistes ou de leurs collègues d'une autre spécialité. Que l'on songe à Einstein avec ses histoires de train et d'ascenseur dans ses ouvrages de vulgarisation ou à d'Espagnat avec ses histoires de parapluies pour expliquer les inégalités de Bell alors que la démonstration, d'un niveau de mathématiques élémentaires, tient en une petite colonne de revue. Songez également aux charmantes expériences de pensée d'Einstein, Bohr, Pauli et consort, expériences assorties de dessins cocasses (une balance à photon, par exemple, dessinée dans la meilleure tradition des dessins de l'Encyclopédie). D'ailleurs, ces histoires d'expériences de pensée, font penser, dans les Grenouilles, d'Aristophane, à la dispute d'Eschyle et d'Euripide aux enfers où ils tentent de peser leurs vers. Toujours Bohr parvient à blouser Einstein dans ces histoires de balances, car il parvient toujours à placer "sa petite fiole" c'est à dire, ici, son delta p delta q plus grand ou égal à h, ou h barré sur deux pi, je ne sais. Cependant, Einstein, tel Euripide ne s'avouera jamais vaincu. Musil, il me semble, inaugure la tendance inverse qui est de recourir à des métaphores mathématiques pour éclairer l'obscurité du monde. Mais Lautréamont déjà avec ses "beau comme...
Sincères salutations
Ingénieur Randal.